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Fucking Love - Page 3

  • Fucking Love #1 - For Play - Chapitre 17

    Chapitre 17

    Dereck

     

     

    La soirée des Grabbys se termine avec un quadruplé pour FUCKING BOYS. Scarlett est heureuse comme jamais, elle va pouvoir se vanter

    Le label a raflé l’Awards du meilleur actif pour Jax, son statut de gay for play semble plaire aux jurées et ses prouesses ont été saluées. On repart également avec le meilleur solo grâce à Brooks, ce dernier nous a fait un show sur scène en récupérant son prix, un mime de branlette qui a éclaté la foule. Très différent du sourire timide de Jax.

    Nous avons eu la chance avec Jax d’être élue duo le plus hot de l’année, ex-aequo avec deux gars de MENS.

    Et pour finir, je rentre avec une statuette du meilleur newcomer pour la première fois. D’habitude, je n’étais jamais nommé. SPIT OR SMALOW a tellement d’acteurs qu’on est noyé sous la masse, et ce n’était sans doute pas plus mal étant donné l’état dans lequel j’étais.

    La cérémonie de remise des prix était des plus chaudes. L’ambiance était électrique et ceux qui se sont occupés de monter le show ont fait un sacré boulot de recherches. Ils ont diffusé des extraits de films qui ont fait monter la température. Pour notre duo, c’était un bout du plan de notre trio, lors du final. Putain j’en ai bandé comme un fou durant plusieurs minutes.

    Jax a mes côtés, me jetait des regards plus qu’équivoques. Ces dernières heures ont été folles et d’une intensité palpable. Je ne rêve que d’une chose, le coincé dans une zone discrète et lui enlever ce sourire.

    Nous n’avons presque pas dormi de la nuit, nous avons passé des heures à user du corps de l’autre entre les draps, tachant nos peaux des preuves de nos ébats. On s’est envoyé en l’air comme jamais, dans une dizaine de positions, dans la douche, sur le fauteuil de sa chambre, par terre et contre le mur. Et ce matin, alors que la journée se levait sur Chicago, on a commencé ce jour de célébration sur le balcon de sa chambre, nu, lui contre mon dos à me faire transpirer et gémir avec possessivité.

    C’était délirant et tellement bon. Jax m’a surpris comme jamais. Quand il lâche les rênes, il le fait à fond. Je ne l’aurais pas pensé si passionné en privé. À Los Angeles, il contrôle ce qu’il dit, ce qu’il pense, ce qu’il fait parce qu’il y a Sage, mais sans sa fille, Jax m’a chamboulé.

    Il est encore plus drôle que d’ordinaire et j’ai découvert quelqu’un de tendre et d’affectueux qui n’avait pas peur de montrer par des gestes, ce qu’il n’arrivait pas à dire avec des mots. Je crois que les idées fusent dans son esprit, qu’il se pose beaucoup de questions.

    Lorsque nous étions en présence des autres pour un super repas dans un restaurant branché, nous avons ri, bavardé, partagé un moment d’amitié entre potes. Chacun a raconté des anecdotes de tournages, avant ou depuis qu’ils sont affiliés à FUCKING BOYS.

    Brooks et Lake se sont montrés encore plus proches l’un de l’autre, j’ai appris qu’ils venaient tous les deux d’Angleterre, mais je n’avais pas fait le lien avec le léger accent qui peut apparaitre à certains moments.

    Ils sont partis de chez eux à dix-huit ans et j’ai cru comprendre que c’était pour des raisons qui n’étaient pas sympathiques. Ils affirment clairement qu’ils sont ensembles et amoureux, ce qui n’a pas cessé de faire rire Archer.

    Jax m’a confié que ça allait de moins en moins entre lui et Demon, mais je n’ai pas réussi à savoir pourquoi, même si j’ai déjà une petite idée en tête.

    Scarlett nous a raconté ses péripéties de réalisatrices, elle devait caster deux mecs pour former un nouveau duo et ils ont essayé de la brancher elle.

    Jax n’a pas raconté des choses extraordinaires, par exemple, son premier partenaire ne comprenait pas qu’il n’arrivait pas à bander juste en le voyant. J’ai ri aux éclats, celui-là devait avoir un sacré égo.

    Et je crois que ce qui me plait c’est son silence qui en dit long en public, les petits pics qu’on s’envoie, et les gestes volés dans l’obscurité discrètement.

    Il essaie et bordel, je suis fou. Tout comme je suis fou de lui avoir demander ce plus qui le fait flipper à cause de son passé.

    Et je suis dingue de lui avoir dit que j’étais tombé amoureux de lui, pourtant, c’est le cas.

    Mais je ne suis pas Bell, je ne suis pas une femme, et ça peut être différent. Ça l’est déjà. Je n’ai jamais vécu ça avec un homme. Cette sensation d’être possédé physiquement et intellectuellement par une personne. Jax me met dans des états de nerfs intenses, il me chamboule le restant du temps.

    C’est dangereux pour un ex-camé, mais je n’ai pas envie que ça cesse.

     

    — Bon, on salue fièrement les gars qui ont sauvé l’honneur des studios ! scande Archer en levant sa bière.

     

    Nous faisons tous comme lui. L’Hardeur est en forme, je crois qu’il n’a pas dessoulé du week-end. Brooks et Lake nous ont raconté au petit déjeuner qu’il avait fait un peep-show plutôt hot avec deux mecs de MENS, dragué la moitié des acteurs gay ou bi. Il parait qu’il a fait sensation aux deux after des studios NO LIMITS et PLEASURE. Les deux Anglais s’en sont amusés, mais Jax a tiré une sale tête.

     

    — Mais avant ça, il faut faire un toast !

     

    Archer se tourne vers Brooks qui se fait tripoter par Lake. Le brun mordille l’oreille de son partenaire qui se mord la lèvre en rougissant.

    Ces deux-là semblent insatiables.

    Mais Brooks devient subitement sérieux en voyant tous les regards dans sa direction. Archer lui jette un clin d’œil en annonçant :

     

    — À Brooks, parce que bordel, même si l’extrait n’a duré que vingt secondes, tu te branles comme un dieu !

     

    Tout le monde l’applaudit en faisant taper ses bières sur le comptoir du bar de la discothèque, la musique n’est pas assez forte pour être désagréable et beaucoup sont aller au défilé deMENS.

     

    — Et il branle comme un dieu, commente Lake en lui pinçant les fesses.

     

    Ce dernier lui lance un regard équivoque, Brooks l’attrape par la nuque pour plaquer sa bouche contre la sienne et l’embrasser avec cette passion qu’ont les gamins à peine sortit de l’adolescence.

     

    — Ils sont partis pour se tripoter toute la soirée, commente Autumn en souriant.

     

    — Tu viens quand tu veux ma belle, plaisante Lake.

     

    La petite rousse vire au rouge tomate, les mecs se moquent gentiment d’elle.

     

    — J’en connais un aussi qui astique comme personne, taquine Jax en buvant à sa bière.

     

    Je me tourne vers lui en prenant un air offusqué. Tout le monde fait de même.

     

    — Est-ce que tu t’en plein ? je souligne en attrapant sa bière.

     

    Jax me la pique de nouveau en haussant un sourcil.

     

    — Et toi ?

     

    Une tension nous gagne alors que nous nous affrontons silencieusement. Un frisson nait sur ma peau Un frisson nait sur ma peau ainsi qu’une putain d’excitation.

    Une nuit n’a pas suffi à faire redescendre ce qu’on avait emmagasiné depuis plusieurs mois.

     

    — Est-ce que notre duo de l’année aurait des choses à nous dire ? plaisante Scarlett en se glissant entre nous.

     

    Nous rompons tout contact visuel et nous nous contentons de boire à nos bières respectives. Notre réalisatrice vêtue de sa superbe robe de soirée rose moulante est magnifique, encore plus avec quelques verres, elle fait moins sérieuse.

     

    — J’exprimais les talents de mon partenaire, se contente de répondre Jax.

     

    Et moi, je me contente de vivre les siens.

    Archer nous sort de notre séquence compliments en brandissant sa bière à moitié vide et nous offre un toast digne de son taux d’alcoolémie.

     

    — À Jax et Dereck, parce que BORDEL, c’était putain d’excitant de voir l’extrait où j’ai moi-même participé, même si on ne me voyait pas. Continuez de baiser c’est un régal pour les yeux !

     

    Un rire commun nous gagne et nous poursuivons la soirée en se remémorant la cérémonie avant que la fête ne commence. Et j’apprécie le fait d’être avec des gars bien, sans drogue, sans animosité. Juste entre amis. Ça me change tellement de ce que j’ai vécu avec SPIT OR SMALOW que j’en arrive presque à baisser ma garde.

     

    ***

     

    Je percute que je n’ai pas été suffisamment prudent lorsque je me retrouve plaquer contre le mur de l’ascenseur et que des gars pénètrent après moi.

    Mon cœur s’emballe. Je mets quelques secondes à comprendre ce qu’il vient de m’arriver. L’adrénaline parcourt mon corps en un instant, mon souffle devient plus rapide lorsqu’une voix familière résonne à mes oreilles.

     

    — Dereck, enfin seul !

     

    On me retourne brutalement pour que je fasse face à mes agresseurs. Je ne suis même pas surpris de voir que Garrett et Dan me maintiennent fermement, j’essaie de me sortir de leur prise, mais ces deux enfoirés ont plus de force que moi en étant seuls.

    Bordel.

    Je tente de garder mon calme, je dévisage le réalisateur qui tente de m’impressionner en me jetant un regard noir.

     

    — Dit à tes deux sbires de me lâcher, Battle, j’ordonne.

     

    Mon ancien boss est un gars d’une cinquantaine d’années, habillé comme un mac à pute, les cheveux grisonnants brossés en arrière, un piercing à l’oreille et une barbe grise soigneusement taillée. C’est un salopard doublé d’un truand.

    Il se met à rire, retrouver les manches de sa veste de costume, puis de sa chemise et avant que je n’aie le temps de renchérit mes propos, le coup de poing dans mon ventre, part.

    Je me plis en deux, mon souffle se bloque, Garrett et Dan me tirent en arrière pour que je me redresse.

    Merde !

    Battle appuie sur le bouton de l’ascenseur pour le stopper.

     

    — Ça ne va pas durer longtemps. J’ai quelques mots à te dire. Puisque les signes que je t’ai envoyé à ton nouveau studio et à Demon ne t’ont pas suffi.

     

    Je me doutais que c’étaient eux, les investigateurs des courriels que Scarlett recevait, Jax m’en a parlé. Tout comme j’avais compris qu’ils étaient les responsables du saccage d’une partie du studio. Scarlett ne voulait pas d’ennuis, n’a jamais porté plainte. Elle aurait dû, mais la réalisatrice cultive le secret et ne veux pas faire de vagues.

    Et moi ? Je ne peux pas en parler.

    Sa voix est toujours profonde et dure à l’oreille. Il est autoritaire de nature, mais je ne suis plus le camé qu’on pouvait manipuler en lui faisant marchander une dose.

    Je résiste, et même s’il compte me tabasser, je résisterai parce que je refuse d’être faible de nouveau.

     

    — Et moi je n’ai rien à te dire, je réponds en essayant de dégager mes bras.

     

    Garrett et Dan, le grand roux aux yeux verts secoue la tête pour me dire de rester calme.

    Sinon quoi ?

    Battle ignore clairement mes propos. Il s’approche de moi sans me dévisager, comme si je n’en étais pas digne et poursuis son laïus.

     

    — Quand tu vas rentrer de Chicago, tu vas retourner chez toi et tu vas me réexpédier ma casette en prenant soin que…

     

    Je le coupe sans hésitation en riant, outré.

     

    — Non, je ne ferais pas ça. On te voit sur cette putain de casette ! On t’entend ordonner à ton enfoiré d’acteur de lui tirer une balle entre les deux yeux pour l’achever ! je hurle, furieux.

     

    Il a fait assassiner un gamin qui n’avait rien demandé et sur la vidéo filmée sans montage, on entend tout.

    Je ne lâcherai pas. Mon ancien Boss paiera.

     

    — Enfoiré, t’es foutu, j’ai une dizaine de copies remise à des gens de confiance, s’il m’arrive quelque chose, tu vas directement en taule.

     

    Je bluffe, mais j’espère être suffisamment convaincant.

    L’atmosphère dans l’ascenseur devient tendue, il baigne un sentiment de danger mêlé à la colère. Je vois mon ancien réalisateur inspirer en serrant les poings, furieux.

    Battle s’approche de moi en prenant sa démarche qui m’inquiétant avant, celle imprévisible qui ne me permettait pas d’anticiper ces gestes.

    Il attrape mes cheveux et me tire vers lui en me foudroyant du regard furieux.

     

    — Tu ne prendrais pas le risque que ton unique preuve contre moi s’altère en tentant de faire des copies. Je te connais Dereck, tu as le souci du détail et de l’authentique.

     

    Je ne me retiens pas, je lui envoie un coup de pied bien placé qui me vaut d’être sonné par Garrett qui réagit encore plus vite. Son crochet m’explose le visage avec violence. La douleur se répercute dans toute ma tête, mon souffle se coupe, ma joue me brûle et par miracle, je ne saigne pas. Mais bordel ce que ça fait mal.

    Je ne suis pas le seul à souffrir de cet interlude. Mon ancien réalisateur explose en jurant, plié en deux.

     

    — C’en est assez de ce jeu ! Tu me renvoies la casette ou je viendrai la chercher moi-même, qu’importe les risques ! Qu’importe ton frère ! Je serai prêt à faire intervenir mes amis haut placés pour régler ce problème !

     

    Silence.

    Je suis toujours bloqué contre le mur par Garrett et Dan qui a glissé son bras sous ma gorge et fais une pression suffisante pour m’empêcher de bouger à nouveau.

    Au son de sa voix furieuse, je comprends qu’il ne plaisante pas. Et j’avais raison, le plan de Vinz ne suffisait pas. Son enquête est au point mort, mais pas mes bourreaux.

    Battle m’affronte durement du regard et conclut notre échange de la façon la plus flippante :

     

    — Et avant que nous nous quittions, je tiens à ce que le message passe, histoire que tu piges que je ne plaisante plus !

     

    Il fait signer à Garrett, mon cœur s’emballe, je me demande ce que cet enfoiré va faire.

    Et je ne tarde pas à le savoir.

    Je le vois sortir de la poche de sa poche un tube semblable à une seringue pleine. Mon cerveau pige à la seconde. Mon sang ne fait qu’un tour.

     

    — Garrett, bordel, ne fais pas ça ! je lance en commençant à paniquer.

     

    Mon ex me sourit avec sarcasme. Je me débats malgré leur prise, des coups partent. Tout se passe si vite que mon esprit se déconnecte. Ma tête tape. C’est comme s’il s’arrêtait de marche quelques secondes pour encaisser le choc à venir.

    Je sens une violente douleur dans le bras, quelque chose se brise en moi. Je me débloque, et le reste suit. La peur m’envahit, doublée de la colère face à cette putain d’injustice.

    J’entends le ding des ascenseurs ainsi que les portes s’ouvrir à mon étage.

    Je respire violemment en essayant de reprendre contenance et lorsque mes yeux s’ouvrent de nouveau, je croise un regard que j’espérais ne pas voir.

    Celui de Jax.

    Il était parti se changer pour la soirée en boite de la cérémonie, son costume le mettait mal à l’aise. Au départ, j’étais parti voir s’il s’en sortait quand ma route a croisé Battle, Garrett, et Dan.

    Putain de karma.

    Tout le monde se fige en voyant Jax. Mon partenaire se raidit et à travers mon état de stupeur, je pense le voir froncer les sourcils, furieux en constatant qu’il s’est produit quelque chose de grave.

    Battle réagit rapidement cependant. Il fait signer à Garrett et il s’exécute.

     

    — A bientôt Dereck.

     

    Garrett me pousse vers la sortie de l’ascenseur, Jax m’attrape au vol, et mon ancien partenaire sélectionne un étage pour disparaitre l’instant d’après.

    Les portes se ferment, l’ascenseur disparait. Je vois trouble, je tremble, ma respiration est erratique, j’entends à peine la voix de Jax.

    Par contre, je sens ses bras qui tentent de me maintenir à flot.

    J’arrive à me dégager de sa prise, je dois m’isoler, je dois me protéger d’eux, je dois prendre une douche, me mettre en sécurité, attendre que ça passe.

    Je perds la tête.

     

    — Dereck ! Merde ! Qu’est-ce qu’il s’est passé ! Qu’est-ce qu’ils t’ont fait !

     

    Je marche comme un fou en tanguant tellement j’encaisse le choc. J’essaie de me dire que ce n’est pas possible, mais les réactions sont là : ils m’ont injecté de la drogue et elle est en train de se diffuser dans mon organisme.

    Je traverse la moitié du couloir vide d’étranger, il n’y a que Jax sur mes pas. Mes yeux me brûlent, mon corps se serre, j’ai envie de m’effondrer tellement c’est dur. Tellement la réalité me frappe de plein fouet.

    Je vais rechuter. Ils m’ont fait le pire.

    Je perds l’équilibre, je respire de plus en plus vite, je sens monter l’angoisse. Je vais exploser.

    Je m’arrête contre le mur du couloir, prend appuie contre ce dernier, j’essaie de chasser cette boule dans ma gorge, mais rien n’y fait.

     

    — Dereck…

     

    La voix de Jax n’est qu’une déchirure à l’oreille. Je le sens dans mon dos, je frissonne, je veux pas être ce type-là devant lui.

    Je tente de le repousser, mais je heurte le vide. Jax se rapproche davantage, ses mains se referment sur mes épaules, je le vois double devant moi.

     

    — Va chier Dereck, je ne te laisse pas, lance-t-il à mon oreille en me serrant contre lui.

     

    À la pression de ses bras sur moi, je m’effondre pour de bon.

    Je m’écroule sur le sol et entraine Jax dans ma chute. Je me laisse aller, assis contre le mur. L’étreinte de Jax est rompue.

    Je ferme les yeux, les larmes me brûlent à l’intérieur, mon cœur bat si vite que je crains de virer dans les paumes.

    Ce n’est pas juste.

     

    — Parle-moi, me demande Jax près de moi, dis-moi ce qu’il s’est produit avant que j’aille faire quelque chose que je vais sévèrement regretter.

     

    — Ne fais pas ça… je murmure, ne va pas te frotter à eux…

     

    Je sens son regard, mais je n’ai pas le courage de l’affronter. Je tremble de plus belle, à l’intérieur de moi, des plaies anciennes s’ouvrent de nouveau et saignent. J’ai envie d’hurler, envie que ce poison qu’ils m’ont injecté sorte, envie de tout recommencer, que cet instant n’est jamais existé.

     

    — Je ne voulais pas que tu voies ça, je souffle.

     

    Jax essaie de m’attirer contre lui, je le repousse. Des larmes de rage glissent le long de mes joues, je suis défait. Je frotte mon bras comme pour faire partir la sensation.

     

    — Je voulais tourner la page, je voulais oublier. Je voulais tout recommencer, mais ça ne fait que revenir.

     

    Ce putain de passé revient.

    Perdu dans mes pensées sombres, Jax arrive enfin à m’attirer contre lui, je me laisse faire, incapable de lutter contre lui et contre moi-même.

    Je continue de frotter mon bras en tanguant, je n’arrive pas à faire face. Je ne peux pas encaisser ce qu’il s’est produit.

     

    — Je ne suis pas quelqu’un de bien, je murmure contre lui.

     

    — Bien sûr que si.

     

    Je secoue la tête, je n’y vois rien, les larmes coulent, la peine me dévore et la violence de ce qu’il s’est passé par leur geste me rappelle ce contre quoi je me suis battue depuis des mois.

     

    — Non Jax, je ne suis pas quelqu’un de bien, je répète.

     

    — Ce n’est pas parce que tu baignais dans la drogue que tu es quelqu’un de mal, m’explique Jax en essayant de m’attirer plus à lui.

     

    Je m’accroche à sa veste, il ne comprend pas. Il ne comprend pas que la drogue ce n’est rien à côté de ce qu’on m’a fait faire pour ça. Je ne suis qu’un putain de monstre qui a tourné des choses affreuses pour le fric, pour une dose. Et aujourd’hui, je paie cher ma liberté parce que je veux dénoncer ce système qui a entretenu mes vices.

     

    — Dereck, parle-moi… continue Jax.

     

    — J’ai fait une grave erreur en voulant entrer dans ta vie, je marmonne d’un air absent, je suis un camé, un putain de mec qui ne méritent pas tout ça.

     

    — L’erreur que tu fais, c’est en disant de pareilles conneries, répond Jax avec sérieux.

     

    Je ferme les yeux, l’eau salée continue de brûler mes joues. Mon partenaire me secoue, je ne réagis pas, je me balance en laissant échapper des sanglots de plus en plus bruyants. Je ne me reconnais pas. J’ai l’impression d’avoir fait un bon dans le temps.

     

    — Merde qu’est-ce qu’on t’a fait pour qu’on arrive à te mettre dans un tel état ?

     

    Le ton de la voix de Jax ne cache pas son inquiétude. Je tente de m’exprimer du mieux que je peux. Mon partenaire est juste devant moi, je le vois flou, mais je sens ses mains essuyant les larmes brûlantes.

     

    — Ils m’ont injecté quelque chose. Ils m’ont injecté de la drogue bordel… je délire.

     

    — Dereck, laisse-moi faire.

     

    Jax essaie de me sortir de mon état de transe. Il tente de retirer ma main de mon bras pour voir, mais je continue.

     

    — Je n’ai rien pris depuis des mois… je gémis malade à l’idée qu’ils aient gâché ça.

     

    Je fais cette terrible constatation, mon travail sur moi-même est parti en fumée. Je suis tellement paniqué à l’idée de ce qu’ils m’ont injecté dans l’organisme.

    Héroïne ? Pire ?

    Jax arrive à retirer ma veste et à soulever mon t-shirt gris. Je sens sa main sur moi et la nausée me gagne. Je sais ce qu’il va voir et ce qu’il va comprendre ensuite.

    Je ne suis qu’un camé.

     

    — Dereck, regarde-moi, me presse-t-il avec calme.

     

    Jax pose son front contre le mien. Sa main libre se fourre dans mes cheveux, il embrasse ma peau brûlante en essayant de m’apporter la paix.

     

    — Il n’y a aucune trace d’injection. Ce n’est qu’une illusion. Ils ont fait semblant, m’explique-t-il sur un ton compatissant.

     

    Ses doigts touchent de nouveau mon triceps, comme pour me prouver qu’il n’y a pas de zones meurtries. Je ne ressens rien, pas la sensation qu’on a sur la peau lorsqu’une aiguille nous la transperce. Juste le toucher tendre de mon partenaire qui cherche par n’importe quel moyen de m’aider.

     

    — Ils ne t’ont rien fait de ce côté-là, m’assure Jax d’une voix serrée.

     

    Je ferme les yeux en me laissant aller, et pour la première fois depuis des mois, des sanglots brûlants glissent le long de mes joues dues au soulagement. Le déchirement résonne. Ils ne m’ont pas injecté une merde, ils ne m’ont pas fait replonger.

    Je sens le regard désarmé de Jax sur moi. Il doit me prendre pour un fou, il doit ne pas comprendre comment un gars comme moi, Dereck – Blacks – Cole, si fort, je me retrouve à 31 ans, à me taper une crise de panique telle un enfant.

    La peur m’a tellement dévoré l’espace d’un instant que j’ai cru être de nouveau tombé. J’ai vu défiler ses premières semaines de sevrages ignobles où le manque me tordait les tripes parce que la drogue me manquait et parce que j’avais atteint des limites sans retour. Je n’ai jamais touché à l’héroïne, mais tout le monde sait que c’est ce qu’il y a de pire pour un ancien camé. Quand j’ai vu Dan sortir cette seringue, j’ai compris que j’étais foutu. Le travail que j’avais fait sur moi allait partir en fumée et je devrais quitter ma place chez FUCKING BOYS, rappeler mon frère et me faire interner pour recommencer.

    Je pleure silencieusement en séchant d’un geste brusque les larmes salées sur mon visage. Jax m’attire contre lui, je ne résiste pas.

    Je ne veux pas être cet homme-là.

    Pourtant Jax n’en a rien à faire. Assis en plein milieu du couloir, il me serre contre lui en caressant mes cheveux et en embrassant ma tempe. Je trempe sa veste en m’agrippant à elle. Mon corps tremble. Je suis sous l’emprise de la peur et de l’adrénaline qui redescend. 

     

    — Je suis là, même si je ne comprends pas, je suis là, chuchote mon partenaire à mon oreille.

     

    Des gens passent devant nous, mais ne nous prêtent pas attention. Je crois qu’un regard noir de mon compagnon leur suffit à poursuivre leur route.

    J’ignore combien de temps nous restons ainsi, mais en voyant que je ne me calme pas, Jax réagit. Il se redresse, sort de la poche arrière de son pantalon de costume sa carte magnétique pour ouvrir la porte. J’entends à peine le clic de l’ouverture de sa chambre.

    Je ressemble à un putain de pantin qui n’y voit rien. Jax me tire par le bras pour que je me relève et me prends dans les siens en me soulevant. Il glisse mes jambes autour de sa taille, je me tiens à son cou en me blottissant contre lui telle une âme en peine. Mon partenaire me serre contre lui en nous faisant pénétrer dans sa chambre. La pénombre nous accompagne, fidèle compagne de mon état d’esprit.

    Jax nous porte jusqu’au lit, où il nous y allonge. Mon corps sent à peine le matelas et l’odeur légère de l’acteur dans les draps. Il se glisse dans mon dos et me serre contre son torse. Ses bras musclés m’enserrent avec force. Ma vue se brouille de plus belle et je n’arrive pas à résister au choc. Je sombre, pour ce soir, je m’autorise à lâcher du lest.

    C’était censé être le week-end déboire, où nous aurions dû nous chauffer à danser dans toutes les soirées, nous amuser ensemble avec Jax et les mecs. Mais ça ne s’est pas passé ainsi ce soir.

    Le passé m’a rattrapé au moment où j’aurai voulu penser à l’avenir seulement. Si je suis fort pour affronter n’importe quoi, quand il s’agit de ça, je ne me reconnais pas.

    Je ferme les yeux en m’agrippant au bras de Jax. Je n’arrive pas à lui faire face alors qu’il tente de me tirer vers lui. Je doute d’avoir le courage de l’affronter, de lire le doute et l’inquiétude.

     

    — Je suis là, répète Jax en embrassant ma nuque, et ça va aller Dereck, je te le promets.

     

    Nous sommes restés là, blottis l’un contre l’autre durant un long moment avant que je m’endorme. Mon partenaire a calmé ma crise de panique lentement, chassant ma peur par le réconfort de ses mots et la chaleur de son corps. Ça m’a vaguement rappelé une nuit similaire lorsque mon amant était dans un sale état à son tour.

    Jax n’a pas posé de questions même s’il en avait. Il n’a pas essayé de comprendre pourquoi mon ancien label avait essayé de m’agresser, il n’a pas demandé les raisons qui pouvaient m’amener à avoir de telles emmerdes. Il a été là. Et l’espace d’un instant, je me suis rendu compte ce que ça faisait d’être réellement avec quelqu’un.

     

    AMHELIIE

  • Fucking Love #1 - For Play - Chapitre 7

    Chapitre 7

    Dereck

     

     

    NOVEMBRE 2016

     

    Trois mois plus tard…

     

     

    Il pleut rarement à Los Angeles et le seul jour où le ciel a décidé de faire la gueule, on va se faire un footing sur les hauteurs des collines, loin de la ville, loin du monde.

    Jax m’a envoyé un SMS très tôt ce matin pour que je le rejoigne courir. Il m’a dit que le meilleur endroit pour le jooging sans croiser des enfoirés prétentieux c’était le Mont Lee.

    En plus Jax a eu vent de l’absence de mes visites touristiques de la région et semble se charger avec sa fille de me montrer les endroits les plus célèbres de Los Angeles et d’Hollywood.

    Le Griffith Observatory a été sa première proposition. Jax adore y aller et en apprenant que j’étais un féru d’astronomie et d’étoiles, il a exigé ma présence. On a emmené Sage un samedi après-midi, il y avait beaucoup de monde, mais étrangement, le Planétarium était assez déserté. J’en ai profité pour faire découvrir à la fille de Jax toutes les choses que j’avais apprises au cours des années. Sage est géniale pour une gosse, elle est drôle, remplie de petites mimiques, son caractère est coriace, parfois elle me fait penser à son père lorsqu’elle est dans son entêtement.

    Dix jours plus tard, on est allé faire les studios d’Hollywood avec Mason et Mack, avant de faire de long en large le « Walk of Fame » sur Hollywood Boulevard pour trouver les étoiles de Bob Marley, Michael Jackson, Mickey Mouse, Muhammad Ali et même le chat qui tire la gueule Grumpy Cat.

    On a enchainé quelques semaines plus tard sur les empreintes au Chinese Theatre. On a trouvé celles de Will Smith, de l’équipe d’Happy Potter, de Sylvester Stallone, Johnny Depp, Marylin Monroe et même Harrison Ford. Sage n’arrêtait pas de mettre ses mains et ses petits pieds dans les marques en disant qu’elles étaient trop grosses.

    La semaine dernière, Jax et Archer m’ont trainé au Warner Bros, comme de vrais touristes on a embarqué pour un tour organisé des studios. On a pu découvrir les coulisses de certains de nos films préférés. C’était très sympa, un peu attrape couillon comme visite, ne montrant que le beau et pas le reste. Mais on s’est marré.

    On fait des tas de trucs tous ensemble, que ce soit avec certains gars du studio, de l’équipe, ou seulement Jax et moi.

    J’ai compris que Jax tenait vraiment à que tout se passe bien entre nous. Il m’a confié qu’il avait l’impression que les départs répétés de ses anciens partenaires allaient lasser Scarlett et qu’un jour, ce serait peut-être à lui qu’on demanderait de partir.

    On a tenté une soirée entre mecs au cinéma en allant voir l’avant-première d’un film d’horreur. Ça n’a pas eu son grand succès, Demon n’est pas venu, Archer est sorti au bout de vingt minutes, Lake un quart d’heure après lui. Zane s’est endormi, Mason était assez blanc à la fin du film et Brooks riait des conneries de montages. Jax et moi avons été les seuls à commenter le film de façon intelligente sur l’intrigue et le reste.

    J’ai découvert un autre monde du porno que celui que je connaissais. Avant, je n’avais que des collègues, des gars avec qui je baisais et que je recroisais de temps à autre, la plupart, étant des concurrents. Il n’y avait as de réelles relations d’amitié, il n’y avait que la concurrence, rester le meilleur pour ne pas être dans l’ombre des petits nouveaux. C’est dans ce genre de situation qu’on sombre facilement.

    Et je sais de quoi je parle.

    La pluie se fait de plus en plus forte alors que nous continuons de courir sur la route déserte. Quand des torrents d’eau nous trempent, on décide de rebrousser chemin.

    Sur le retour, Jax est très concentré et j’ai découvert un certain talent pour agacer le père de famille. Je pense que Jaxson devrait se détendre parfois. J’ai compris que sa vie était loin d’être simple. À vingt-cinq ans, il a des responsabilités que je n’ai pas encore à trente et sans doute, que je n’aurais jamais.

    Sa fille est le centre de son univers, plus je passe de temps avec eux, plus je constate qu’il fait tout pour elle, en se sacrifiant lui. Pas une seule fois, Jax m’a parlé d’une femme, et lorsque je lui ai posé la question l’autre jour, il m’a simplement répondu qu’il n’avait pas le temps pour ça. « Quel genre de femme voudrait d’un mec qui baise d’autres gars et qui a une fille à vingt-cinq ans ? Aucune et pour le moment, je n’ai pas envie de ça. ». Je le comprends aussi. Quand on sait ce que son ex lui a fait…

    Est-ce qu’on guérit d’une telle blessure ? Ça doit prendre énormément de temps et sans doute, ça ne se referme jamais vraiment.

    Jax se fixe énormément de règles aussi. Que ce soit dans sa vie de père ou d’homme.

    Pas d’histoire sans lendemain.

    Pas de coups de folie.

    Pas d’inconscience.

    Presque pas d’alcool.

    Pas de drogue.

    Pas de vagues ni de scandales.

    Pas de surexposition.

    Pas de mélange entre vie pro et perso.

    Quand je lui ai demandé si de temps en temps, il se permettait de relâcher la pression autre qu’au boulot, j’ai eu droit à des révélations surprenantes. C’est là que j’ai appris qu’il avait déjà eu une relation un peu… sexfriend avec Mackenna, mais que les choses étaient devenues trop compliquées. Parfois, mieux vaut rester de simples amis, et ces deux-là, le sont vraiment. Mackenna a la place féminine la plus importante dans la vie de Sage. C’est sa marraine. Jax compte sur elle pour des tas de petites choses et on sent bien que ça gêne le jeune père de famille de ne pas pouvoir tout faire tout seul.

    Mis à part elle, Jax n’a pas répondu. Me prouvant que l’acteur se mettait réellement de côté en tant qu’homme.

    Quant à moi, je n’arrive toujours pas à parler de Miami à mes nouveaux collègues. Même à Jax qui est devenu un ami. Quand le sujet arrive, je bloque. Un sentiment oppressant me gagne et des brides de souvenirs de ce qu’il s’est produit là-bas me font perdre contenance. Il n’y a qu’avec mon frère Vinz que j’en parle lorsque ça devient trop compliqué. L’autre nuit, je me suis réveillé en sueur, l’esprit torturé par Miami. Certains gestes au boulot me font me raidir. Je me rends compte que tout est loin d’être totalement terminé. Il me reste malgré tout pas mal de bagages sur les épaules. Et j’espère qu’avec le temps, je finirais par tirer un trait définitivement sur ces années de ma vie.

    Je l’espère vraiment.

    Comme deux gamins, on se bouscule l’un l’autre en courant, je déconcentre mon partenaire qui essaie d’éviter mes gestes. Je manque de trébucher. Jax s’arrête de courir en riant.

     

    — Dereck, tu vas finir dans la boue si tu continues !

     

    — Tu me demandes un combat au corps à corps Howard ? je le nargue en m’appuyant sur mes genoux pour reprendre mon souffle.

     

    L’endurance, je l’ai davantage à l’horizontale qu’à la verticale.

     

    — Tu perdrais ! renchérit Jax avec assurance.

     

    La pluie ne s’arrête pas, le tonnerre gronde. Il est neuf heures du matin, on penserait que la nuit va bientôt tomber.

    Nos regards se croisent, un sourire se dessine sur chacun de nos visages et je comprends qu’on va se lancer un défi. Je romps ce silence soutenu le premier.

     

    — Le dernier arrivé à ta caisse paye un café à l’autre.

     

    Je commence à courir avant même de terminer ma phrase et Jax fait de même. On courre, j’essaie de tenir le rythme et dès que nous voyons le 4X4 de Jax, ce dernier se tape un sprint hallucinant en se foutant de ma gueule.

    J’en reviens pas.

     

    — Gagné ! déclare l’acteur en touchant son capot.

     

    J’arrive quelques instants après lui, trempé, le corps en feu et le souffle en vrac. Ce salop m’avait caché ça.

    Je tente de reprendre une respiration normale malgré l’effort.

     

    — Dereck Cole, tu me dois un café !

     

    — Et toi, tu me dois un poumon ! je lance, essoufflé.

     

    Un rire nous gagne et quelque chose se produit l’instant d’après. Isolés, au milieu de rien, nos regards se trouvent de nouveau. Jax cesse de sourire et moi aussi. La tension nait de nulle part, mon rythme cardiaque s’accélère, je vois mon partenariale retenir son souffle.

    Qu’est-ce qu’il se passe ?

    Jax me demande silencieusement la même chose et la seconde d’après, tout bascule.

    On se retrouve contre la portière, mon corps vient se coller contre celui de Jax. Ma main se fourre dans ses cheveux et nos bouches se posent l’une sur l’autre avec avidité.

    Qui a fait le premier pas ?

    Pas un instant il ne me repousse, pas un instant, nous n’hésitons.

    Sous la pluie torrentielle, nos fringues nous collent à la peau. Aucun de nous n’y prête attention, il n’y a que nos bouches qui se dévorent avec brutalité. Le contact de nos deux barbes naissantes qui se frottent l’une contre l’eau, enflammant nos peaux. Sa langue frôle la mienne, nos dents s’entrechoquent et les succions envoient des déchargent électriques dans tout mon corps.

    Qu’est-ce qu’il me prend de faire ça et diable pourquoi je n’arrive pas à m’arrêter ?!

    Ma main s’immisce entre nous, elle tâtonne à la recherche du lacet du short de Jax. Je sens son érection naissante contre ma cuisse. L’excitation se décuple, l’intimité qui se créer au bord de la route déserte ne manque pas de me filer une myriade d’idées pour éteindre ce feu. Je n’aurais qu’à l’attirer contre le capot de la voiture, le pencher dessus, baisser son bas et me mettre à genoux pour le faire grogner.

    Les hanches de l’acteur remuent contre moi, me ramenant à l’instant T.

    Les doigts de Jax retirent ma capuche pour s’agripper à mes cheveux trempés. Ma langue frôle la sienne avant de dessiner le contour de ses lèvres, Jax jure en me plaquant davantage contre lui. Il revient à l’assaut avec plus de virulence. Chaque caresse de sa bouche sur la mienne est pressante. Nos dents s’entrechoquent, nos gestes deviennent imprécis.

    J’arrive à glisser ma main dans son caleçon, son sexe tendu se durcit davantage lorsque je referme mes doigts autour. Un son étouffé sort de sa bouche. 

    Mon poignet commence à aller et venir de haut en bas. J’essaie de bouger au mieux malgré notre proximité et le mince espace dont je dispose. Ce besoin de contact est incompréhensible, mais terriblement excitant. Les hanches de Jax remuent d’elles-mêmes. L’acteur se défoule sur ma bouche, sa langue frôlant la mienne, et dès que mon pouce passe sur son gland, il défaille.

     

    – Dereck…

     

    Au son de la voix du brun, le choc me heurte de plein fouet. Je me fige, conscient que c’est notre réalité, qu’il ne s’agit pas d’une fougue qu’on peut s’autoriser parce qu’elle est devant les caméras. Ici, il n’y a ni tournage ni scénario. C’est vrai. Ma main est bien autour de la queue de mon partenaire. C’est sa bouche que je dévore et c’est lui qui m’excite comme un fou.

    Quel merdier !

    Mon front repose contre celui de Jax. Dans ma tête, c’est un bordel sans nom. Je ne peux pas faire ça. Je ne peux pas aller au bout, continuer sans nous arrêter. Je vais tout faire foirer.

    Je lâche tout en m’éloignant.

     

    – Merde ! je jure.

     

    Ma main a encore en mémoire la chaleur de son érection. Je la frotte contre mon short pour effacer cette impression qui me fait bander. Il faut que je me calme, mais difficile quand l’objet de son excitation est juste en face de vous.

    Et puisque j’aime me faire mal, je reste là, à observer chacune de ses réactions. Jax reste haletant contre la portière, il n’ose pas bouger. Mes yeux verts se baissent vers son entrejambe, je me maudis de le faire.

    Il bande toujours. Comme moi.

    La tension entre nous ne descend pas. L’excitation bouillonne, le martèlement dans ma poitrine fait échos dans mon esprit.

    Je le veux alors que je ne devrais pas.

     

    – Qu’est-ce qu’on vient de faire ? souligne Jax en rompant le silence.

     

    À ton avis ?

     

    – Est-ce qu’on pourrait oublier ? je demande en essayant de contrôler l’envie que j’ai de rompre les trois pas qui nous séparent pour faire taire ce questionnement.

     

    Mais est-ce que j’ai envie d’oublier ?

    Nos regards se croisent, et la première idée qui me vient à l’esprit est bien celle de recommencer. De sentir de nouveau le contact de sa bouche contre la mienne, de son corps trempé contre le mien et le frissonnement de sa peau sous mes doigts le touchant. Je serre les poings, en colère contre moi-même. Qu’est-ce qu’il m’a pris de l’embrasser lui, alors que je sais pertinemment les limites à ne pas franchir. Je n’aurais pas dû faire ça… mais Jax ne m’a pas repoussé. Pas un instant. Et je me demande qui a commencé le premier, lui ou moi ?

     

    — Oui, me répond mon partenaire en détournant le regard.

     

    Il sort ses clés de la poche de son short, ouvre la voiture et s’y engouffre comme pour me fuir. L’espace d’un instant, je me demande si Jax va m’attendre ou partir. Je reste une minute dehors à sentir l’eau glacer mes pulsions. Et lorsque je monte à mon tour dans le 4X4, Jax a démarré sans dire un mot. Sur le trajet nous menant au studio, nous n’en avons jamais mentionné ce qu’il s’est produit, pourtant j’ai senti un certain malaise. Un malaise qui n’est pas près de passer tant que nous ne savons pas ce qu’il s’est passé.

     

    ***

     

    — Stop ! nous coupe Scarlett.

     

    Je jure en me maudissant. Je cesse de toucher l’érection de Jax qui est tendu comme un arc contre le lavabo de la grande salle de bains. L’acteur détourne le regard, agacé de ne pas rentrer non plus dans l’action. On n’a jamais eu ça. D’habitude, il suffit d’entendre « allez-y » et nos cerveaux se déconnectent de la réalité.

    Plus depuis que le fictif est entré dans cette réalité.

    Aujourd’hui, tout comme hier et avant-hier, je ne suis bon à rien. Toutes les prises où je mène l’action ont dû se tourner en plusieurs fois. Je suis nerveux. Depuis notre interlude dans les bois, un certain malaise s’est créé entre nous. On se fuit un peu avec Jax. Nos regards ont du mal à rester l’un dans l’autre.

    À quoi tu penses ? J’aimerai lui dire. Est-ce qu’il t’arrive de penser au Mont Lee depuis qu’on a quitté la route boueuse ?

    C’est drôle, chez certains, le malaise se produit quand on a vu l’autre jouir, quand on a fait en sorte de le faire succomber et chez nous, c’est la manière dont nous avons cédé à une pulsion qui nous rend maladroits.

    De mon côté, j’y pense. J’y pense le soir, j’y ai pensé l’autre matin en essayant de calmer ma putain d’érection et là, tout de suite, en voyant la réaction de Jax face à ma main se serrant autour de sa queue, j’ai repensé au Mont Lee. À son cul contre la portière, à nos fringues trempées et à cette maudite attirance. Violente, incontrôlable et trop courte.

     

    — Dereck, reprend Scarlett, tu es en plein champ de la caméra, bien que ton cul soit superbe, c’est ce que tu fais avec la queue de Jax qui m’intéresse.

     

    — Désolé, je lance en m’asseyant sur le rebord de la baignoire.

     

    Même mon érection, je n’arrive pas à la tenir cet après-midi. Je suis trop irrité, agacé et je n’aime pas ce qu’il se passe. Ça va bientôt faire cinq mois qu’on bosse ensemble et c’est la première fois qu’ils nous arrivent ça.

    J’entends des chuchotements de la part de l’équipe, je sais que tout le monde se demande ce qu’il se passe, j’en serais le premier heureux de le savoir.

     

    — Est-ce qu’on peut nous laisser un instant ? demande mon partenaire.

     

    Je me tourne vers lui, surpris. Scarlett, Ciera et Leila nous jettent un coup d’œil tout aussi étonnées avant d’acquiescer en laissant tout sur place. Même pas une minute après, nous sommes seuls dans la salle de bain moderne aux tons bleu clair et blanc.

    Jax inspire un bon coup, il garde appuie contre le comptoir entourant le lavabo design.

    L’excitation et la tension sexuelles ne sont pas au rendez-vous non plus aujourd’hui.

    Son regard bleu trouve le mien, je note que son expression porte l’incompréhension.

     

    — Qu’est-ce qu’il se passe ? me demande-t-il avec calme.

     

    — Et toi ? Pourquoi tu es si distant ? je renchéris en me redressant.

     

    Jax détourne le regard à son tour. Et je comprends. Il partage le même malaise que moi vis-à-vis de Mont Lee. Est-ce qu’il regrette ? Est-ce qu’il culpabilise comme moi ? Est-ce qu’il s’interroge ? Pourquoi on se prend la tête pour ça ? Ce n’était qu’un baiser.

    C’était plus qu’un baiser. Ta gueule !

     

    — Je pense à l’autre jour, Jax. Ça ne me sort pas de l’esprit, je finis par avouer.

     

    Jax se raidit, il passe une main nerveuse dans ses cheveux avant de lâcher à son tour :

     

    — Moi non plus je n’arrive pas à comprendre.

     

    L’organe dans ma poitrine se fige. Surpris de nouveau par sa confession. Pourquoi ça tourne dans nos têtes ? Jax est hétéro, je suis gay, on est amis, ça s’arrête là.

    Alors pourquoi on s’est embrassé ?

     

    — Je crois que ça ne s’explique pas, je soupire. Est-ce que d’une certaine façon, j’ai dépassé les bornes sans m’en rendre compte ?

    J’aurais pu, je sais que même si j’ai repris le contrôle de moi-même, il m’arrive de royalement me planter. Le baiser contre la voiture pourrait en être un exemple.

     

    — Je crois que c’est moi qui t’ait attiré pour t’embrasser, souligne Jax, je n’ai rien à te reprocher. C’est plutôt toi qui doit m’en vouloir.

     

    Lui en vouloir ? Il déconne ? C’était… tentant et délirant.

    N’y pense pas !

     

    — OK on fait quoi alors ? Parce qu’on agit comme deux ados et c’est stupide. On couche ensemble presque tous les jours pour le boulot, pourquoi un baiser sur le bord d’une route nous rend si mal à l’aise ?

     

    Jax se raidit

    Parce que c’était dans la réalité.

    Mon partenaire se ressaisit le premier, il soupire en tentant de minimiser les choses, et je sais qu’il a raison. Ce n’était qu’un baiser.

     

    — Je ne veux pas que notre relation au boulot ou dans le privé change. On s’est embrassé, ça s’est produit, on ne sait pas trop les raisons, peut-être le moment ?  Qu’importe, on est adulte pas vrai ? Et tu ne veux pas autre chose que de l’amitié ?

     

    J’acquiesce. Non, je ne veux pas m’engager, l’engagement c’est terminé pour moi. Les histoires qui vont au-delà du cul aussi. J’en ai trop chié l’année dernière, c’est compliqué et dangereux, je veux repartir pour moi, changer de vie et ne pas me la compliquer.

    Même si tu n’as pas eu quelqu’un en dehors du boulot depuis longtemps Dereck, murmure une petite voix que je chasse.

     

    — Je ne veux que de l’amitié Jax et tu le sais.

     

    Ma réponse semble le soulager. Je comprends que cette histoire lui pèse sur les épaules. Normal après trois gars qui lui ont fait le coup.

     

    — Alors, oublions comme tu l’as dit. C’était… un truc surprenant. Agréable, mais surprenant.

     

    Je souris, je suis content de savoir que ma main sur sa queue et ma bouche le dévorant sont des choses agréables.

     

    — J’ai confiance en toi Dereck, reprend Jax, et je sais que tu n’es pas comme les autres. Tu ne dépasseras pas la limite. Ne culpabilise pas et je tâcherai de ne pas être mal à l’aise. On ne va pas se prendre la tête pour ça.

     

    — C’est sincère ce que tu dis ?

     

    Jax m’offre un sourire amusé à son tour, son visage retrouve cette expression familière qui rend l’acteur si agréable.

     

    — Oui. Maintenant que je suis certain que tu n’as pas d’arrières pensés suite à ça, je pense que la tension et l’interrogation vont disparaitre au cours de la journée. Diable pourquoi n’en avons-nous pas parlé de suite ? plaisante-t-il.

     

    Parce que le choc était rude, parce que ni Jax ni moi ne nous y attendions. Mais nous aurions dû. J’espère qu’au prochain coup dur, ça se produira ainsi.

     

    — Ça ne m’a jamais fait ça avec un autre de mes partenaires, m’explique Jax. J’étais ami avec eux, mais je ne m’entendais pas autant qu’avec toi. Est-ce que ça y joue ? Sûrement. Mais entre nous, ça colle tellement pour le boulot et dans le reste, que je ne veux pas que ça change.

     

    — Moi non plus, je reconnais.

     

    Nous restons un instant à nous dévisager, le malaise s’est atténué et sans doute, il disparaitra ce soir. On a beau être des mecs, ne pas trop réfléchir sur ce qu’il se passe, à certains moments, ils nous arrivent de nous tourmenter comme le font des nanas.

    Et pour le coup, il y avait de quoi.

    Trop à perdre et trop soudain.

    Jax se penche pour récupérer son caleçon au sol. Je résiste pour ne pas regarder le mouvement de son corps qui s’articule.

    Calme-toi Dereck, calme ça de suite, ce désir un peu trop pressant qui a commencé à naitre au court des dernières semaines.

    Parce que la vérité est là. Ce n’est pas une histoire de sentiments, seulement de sexe. Mon partenaire m’excite plus qu’il ne le devrait et je ne comprends pas pourquoi.

    Je ferais mieux de me trouver un mec à baiser en dehors d’ici. La ville doit en regorger.

    Qu’est-ce que t’attends alors ?

    Je flippe enfoiré !

    Jax me sort de mes pensées en lançant une vanne :

     

    — Concernant les jeux de spermes de cette après-midi, je pense qu’on peut dire à l’équipe qu’on reporte ça à demain. Je vais accompagner Ciera voir les rushs, peut-être qu’on aura une ou deux bonnes prises.

     

    Jax m’envoie un coup de poing amical dans l’épaule, je tente de l’éviter, mais pris dans mes pensées, je termine le cul dans la baignoire, les jambes en l’air. Jax se prend un fou rire monumental en me voyant. Il rit tellement fort que Scarlett pénètre dans la salle de bain pour voir ce qu’il se passe.

    Notre conversation se termine sur un cliché de la réalisatrice de nous deux, lui essayant de me sortir de la baignoire et moi riant.

    Si je suis toujours sincère, cependant j’ai menti sur une chose : oublier me semble compliquer. Pour ma part, ce sera ranger dans un coin de ma tête à quel point embrasser Jaxson Howard sous la flotte était bandant.

     

    ***

     

    Je regarde mon compte INSTAGRAM en supprimant les commentaires homophobes de la photo. Il n’y en a pas beaucoup, mais pour éviter d’enflammer les foules, je préfère qu’ils disparaissent. J’attends que Ciera ait fini de monter le premier rush du film que nous tournons avec Jax pour savoir si nous avons l’après-midi de libre ou pas.

     

    — Zane, bordel !

     

    Le cri rempli de colère de Mason me tire de mon affaire. Je me tourne vers les deux LivePlayers qui pénètrent la salle. Zane a quelques pas d’avance sur son collègue. Ses traits sont marqués par la colère. L’homme aux cheveux noirs et aux yeux marrons semble être au bord de l’explosion. Mason arrive et dès que Zane le voit, il craque.

     

    — Ta gueule, Mace, n’essaie même pas de te justifier, je ne veux pas savoir !

     

    Savoir quoi ?

    Je reste comme un con assis dans le canapé à les regarder. Mason perd son calme. Il jure avant d’attraper son partenaire par les pans de et le plaque contre le mur entre différentes photos. Je m’apprête à intervenir quand Demon entre à son tour dans la salle commune, l’air décontracté, presque amusé de voir les deux se mettent sur la gueule. Il passe devant Zane et Mason en lâchant un simple :

     

    — Vous faites chier à vous disputer comme des gonzesses, allez vous taper dessus dans votre piaule !

     

    Zane et Mason s’affrontent méchamment du regard, la tension dans la pièce devient palpable. Un sentiment de rage pure les gagne. Qu’est-ce qu’il s’est produit entre les deux ?

    Le Live Player aux yeux marron pousse Mason.

     

    — Ferme là Dem et occupe-toi d’abord de tes merdes.

     

    Zane foudroie du regard les deux acteurs. Il les bouscule en quittant la pièce. Mason reste un instant figé, sa main contre le mur à calmer ses nerfs. Puis, l’instant d’après, il disparait à son tour, laissant la salle commune dans une stupéfaction.

    Demon se laisser aller à un rire en voyant ma tête figée.

     

    — Ça se voit que tu es nouveau. Mais tu t’habitueras à Zane et Mason qui se tapent sur la gueule sans cesse. C’est un des partenariats les plus incompréhensibles de ce studio… un peu comme toi et Jax.

     

    Je soupire en ne cachant pas mon agacement.

     

    — Ça faisait longtemps que tu n’étais pas venu à la charge, Demon, je souligne en lui prêtant peu d’attention.

     

    Mais le Dom en a décidé autrement.

    Il vient s’installer juste à côté de moi sur l’un des trois canapés formant un U dans la pièce. Une tension électrique plus vive que l’interaction entre Zane et Mason envahit la salle. Je me concentre sur mon fil d’actualité FACEBOOK quand Demon me demande :

     

    — J’aimerai savoir qu’est-ce qu’il s’est produit, Dereck, pour qu’on te laisser partir de ce merdier dans lequel on était fourré ?

     

    Je me fige, comme si je venais de me prendre une gifle. Je refoule du mieux que je peux le martèlement dans ma poitrine.

    Il n’y a pas une once de reproches dans les propos de l’Hardeur pour une fois. Je quitte du regard mon portable pour croiser les yeux sombres de Demon. Un sentiment d’insécurité me gagne en y pensant. Depuis que j’ai quitté la clinique privée de New York, je n’en ai parlé à personne et je ne m’attendais pas à côtoyer quelqu’un de mon propre passé dans cette nouvelle vie.

     

    — On ne m’a rien autorisé, Demon. Je suis parti, je lance en dévisageant le vide.

     

    N’y pense pas, me murmure une petite voix.

    Demon se raidit à mes côtés, je sais que ça ne s’est pas passé comme pour moi. Il n’a pas eu la même chance. Mais si j’ai évité un certain nombre de choses que Demon n’a pas pu contourner, j’en ai vécu d’autres, plus violentes.

     

    — Tu es parti, se contente de répéter mon ancien collègue.

     

    — Demon si tu es venu remuer la merde…

     

    — Non, me coupe-t-il, je suis venu te montrer un truc qui nous concerne toi et moi.

     

    L’Hardeur fouille dans la poche arrière de son jean, il en sort une enveloppe pliée qu’il me tend. J’hésite une fraction de seconde à la saisir, mais je le veux. Je veux savoir de quoi il parle.

    Je l’ouvre en ayant l’impression que l’enfer n’est pas loin.

    Quel bordel !

    Je me décompose en voyant des clichés tirés de vidéos qui ne sont pas à la portée de tout le monde. Il y a des photos de Demon… et de moi.

     

    — Je crois que le passé est en train de nous rattraper, Dereck Blacks et j’ai bien l’impression que ton départ impayé n’a pas plus à tout le monde, déclare Demon, nerveux.

     

    Je retourne les clichés et en découvre des menaces bien claires qui ne mettent pas le doute sur l’origine de l’expéditeur.

    Les enfoirés.

     

    — Ce n’est que des mots, je lâche en rangeant les photos dans l’enveloppe.

     

    Demon se met à rire nerveusement, je vois dans son regard sombre l’inquiétude. Je le comprends. Quand on sort la tête de l’eau, on n’a plus envie de se noyer de nouveau.

     

    — Pour l’instant. T’es parti, mais visiblement, ils ont pigé où tu étais.

     

    Je ferme les yeux en chassant les brides de souvenirs qui me reviennent avec violence en mémoire. Le Donjon crée dans l’entrepôt, l’ambiance morbide et dangereuse, les autres.

    J’ai quitté ce monde parce qu’il m’a détruit.

    J’ai quitté ce monde parce que je n’étais plus rien.

    Mais ce monde ne m’a pas quitté pour autant.

    Quand j’ouvre de nouveau les yeux, Demon a disparu en me laissant l’enveloppe. La salle commune baigne dans une atmosphère pesante mélangeant crainte et tension.

    Ne craque pas.

    J’attrape d’une main tremblante le contenu que je photographie à l’aide de mon portable. Je n’hésite pas en ouvrant une de mes seules conversations Messenger.

     

    MOI, 15h26 : Hé Bro, on a un problème.

     

    Je lui envoie en pièce jointe les photos prises. Mon frère met peu de temps à me répondre, même à l’autre bout du pays.

     

    VINZ, 15h28 : Les chiens ! Je m’en occupe. Je te tiens au jus.

     

    Je laisse aller ma tête contre le dossier du canapé, mes mains tremblent sous l’angoisse. J’ai trente ans, je fais bad boy en apparence, mais cette histoire m’a rendu aussi frêle qu’une gonzesse durant plusieurs années et sur certains points.

    Il faut que je sorte, que je quitte les studios pour la fin de la journée. J’ai besoin d’air, de m’éloigner de ce qui pourrait me déclencher une myriade de souvenirs auquel je ne veux pas penser.

    Ma poitrine me serre et j’ai l’impression de manquer d’air.

    Je sursaute en entendant vibrer mon portable, mon frère a fait vite… mais ce n’est pas Vinz.

     

    JAX, 15h32 : On oublie vraiment ?

     

    L’air me manque encore plus en lisant ses trois mots. Jax est soucieux d’avoir la confirmation que notre interlude n’a pas eu d’impact sur le reste.

    Je réponds rapidement sans trop me poser de questions.

     

    MOI, 15h34 : Que tu gémis quand on te chatouille ? Mec, impossible !

     

    JAX, 15h35 : Enfoiré !... Au fait, on doit TOUT recommencer à cause d’un demi-Australien qui cache ma queue à chaque séquence. Je ne te savais pas égoïste à ce point ;).

     

    Un léger rire arrivé à me gagner lorsque je verrouille mon portable. Pourtant, un autre serrement gagne ma poitrine devant une constatation évidente. On oublie, mais je n’ai pas envie d’oublier ce que ça faisait d’être ainsi avec Jax. Parce que l’alchimie et l’attirance sont deux choses qui ne se comprennent pas. On a beau essayer de résister, on ne peut que se battre un temps.

    Pourtant, je ferais taire ça, même si ça ne dure qu’un moment parce que de ce que j’ai compris, Jax en a assez de l’instabilité de ses partenariats. Et d’un certain point de vue, je le comprends. J’en ai besoin aussi pour me reconstruire durablement.

    À la différence de ses anciens collègues, je ne veux rien de lui, pas d’avenir, pas de plus. Ce n’est que de l’attirance. Qu’une histoire de sexe et le sexe, d’une certaine façon, je l’ai déjà. Je devrais me contenter de ça. Et c’est ce qu’on va faire, pour éviter que l’interlude dans les bois se reproduise.

    On oublie vraiment, mais moi, j’aurai du mal à l’oublier lui, comme je n’arrive pas à oublier le reste

     

    AMHELIIE