Irish War, Chapitre 9
CHAPITRE 9
Kenan
Cela faisait bien longtemps qu’une fille n’avait pas squatté mon canapé-lit ultra confortable. Et encore moins à midi un samedi. Le peu de filles que j’emmène chez moi prennent ce qu’elles veulent de moi et ne s’éternisent pas pour le petit déjeuner. Mais Eireen c’est différent. Pourquoi ? Peut-être parce que j’ai pris mon pied à des dizaines de mètres du sol avec elle, peut-être parce qu’elle a une audace qui me coupe le souffle et que la regarder allonger sur le ventre le corps à moitié couvert par mes draps est plus qu’agréable.
Je m’approche et m’assois sur le bord du canapé. Eireen remue un peu, le drap quitte totalement son corps et mes yeux n’en ratent pas une miette. J’ai touché son corps toute la nuit, elle a fini par s’endormir dans mes bras et pourtant je ne me lasse pas de la regarder.
Ma main glisse sur son dos puis sur ses fesses qui me rappellent de bons souvenirs. Elle gémit dans son sommeil en frottant son visage sur l’oreiller. Elle est du côté du ressort récalcitrant et quelque chose me dit qu’elle va avoir de belles courbatures si en plus on ajoute les efforts physiques de cette nuit.
— Kenan ?
— Hum ? je réponds en continuant de la caresser.
— Tu me mates depuis combien de temps ?
Ma main s’arrête entre ses cuisses au-dessus de ses genoux en entendant sa question.
— Si je réponds quinze minutes ?
— Je te classe dans les pervers, dit-elle en croisant mon regard.
— Et trente ?
— Dangereux psychopathe à fuir d’urgence !
Elle se retourne et attrape le drap pour se couvrir et me priver de la vue.
— Cinq minutes, je soupire de déception.
— OK, tu es dans la classe menteur, mais je peux m’en accommoder si tu me donnes cette tasse de café que tu as entre les mains.
Je me lève rapidement et entraine le drap avec moi en reculant de quelques pas. Eireen sourit amusée.
— Il va falloir venir le chercher, je lance après avoir bu une gorgée.
Le regard de défi qu’elle me lance me fait immédiatement bander. Cette femme est en train de me rendre dingue avec son corps, mais aussi par son caractère. Elle est ce que l’Irlande représente : forte, têtue, curieuse, talentueuse, généreuse, drôle et intelligente. Elle est parfaite. Elle pourrait être un membre de l’IRA, elle pourrait se battre pour notre cause si elle n’était pas de ceux qui ne se mouillent pas. Ce qui est son seul défaut. Un défaut étrange pour quelqu’un qui a autant de caractère.
Eireen me sort de mes pensées lorsqu’elle se lève. Mon regard glisse sur son corps pendant qu’elle s’avance jusqu’à moi. Ses seins lourds et tendus, ses tétons roses que ma bouche a adoré gouter. Son ventre chaud et doux et ses hanches larges sur lesquelles mes mains se sont accrochées cette nuit. Eireen prend la tasse, elle boit une gorgée en plongeant son regard dans le mien.
— Il va falloir me rendre ça, je lance en tirant un peu sur ma chaine à son cou, même si j’aime bien te voir avec, si ma mère remarque que je ne l’ai plus, je risque de ne pas survivre à sa colère.
— Ta mère ?
J’enlace ma petite blonde adorable sous son air surpris.
— Notre sixième rendez-vous, tu as oublié ?
— Aujourd’hui ?
— Aujourd’hui, pour le match.
— Le match ? elle demande en reculant d’un pas.
Je la ramène contre moi, un peu trop fort et de café s’échappe de la tasse. Je caresse son visage levé dans ma direction.
— Dans quel pays tu vis Eireen ? je demande avec sérieux.
Elle ne prend pas parti dans le conflit et elle n’est pas au courant des matchs de rugby. Si elle ne buvait pas de whisky, je la prendrais pour autre chose qu’une Irlandaise. Eireen est différente du genre de filles que j’ai connu jusqu’ici et c’est ce qui me plait en elle. Elle n’est pas simple à comprendre, elle est pleine de défi et de découvertes.
— Je me le demande parfois, elle soupire, j’avais simplement oublié que c’était aujourd’hui.
Elle s’échappe et se retourne toujours nue pour rejoindre la petite cuisine. Je lorgne son cul magnifique alors qu’elle me parle.
— Kenan ?
Elle s’est retournée, les mains sur les hanches si elle était habillée peut-être que ça aurait un impact, mais là tout ce que je vois c’est qu’elle est sublime, même agacé parce que je ne l’écoute pas.
Elle revient jusqu’au canapé et enfile mon t-shirt qui traine par terre, comme le reste de nos vêtements.
— Tu vas m’écouter à présent ?
— Je suis tout ouïe, je réponds en la rejoignant près de la cafetière.
— Tu veux qu’on aille voir le match avec ta famille ?
— Oui, c’est ce que j’ai dit.
Je me sers une tasse de café puis je m’appuie contre le meuble pour la regarder réfléchir derrière sa tasse.
— Tu en connais une bonne partie déjà.
— Mais pas tes parents.
— Pas encore.
Ça a l’air de la stresser l’idée de rencontrer mes parents. Pourtant ils vont l’adorer, ils vont aimer sa repartie et son sale caractère. Les O’Shea vont l’adopter rapidement, aussi vite que je me suis fait à elle.
— Ils vont t’apprécier. Tu verras ils sont sympas, ne t’inquiète pas.
— Kenan, je…
— Je ne vais pas te forcer, mais je ne vais pas regarder le match à la télé, alors que je peux le voir en direct au stade.
Eireen se met à rire en sortant du pain pour faire des toasts.
— C’est ton meilleur argument ?
— Non.
Je pose ma tasse et tombe à genoux derrière elle, Eireen n’a pas le temps de régir que déjà mon visage plonge entre ses cuisses. Le voilà mon meilleur argument.
***
On s’arrête au coin du bar, je suis le chargé de ravitaillement du clan O’Shea les jours de match. Eireen s’appuie sur le comptoir à mes côtés. Elle a mis mon maillot de l’équipe, bien trop grand pour elle et portant je trouve que ça lui va parfaitement bien. J’ai fini par la convaincre de m’accompagner, mon argument-choc a fait mouche lorsqu’elle a joui.
Elle me coule un regard sombre, je souris en trouvant la situation excitante. La voir ici, au bar du stade entouré par pleins de gros bras irlandais qui parle fort et jure, elle petite blonde à qui on ne donnerait pas cinq minutes de servies dans un environnement hostile. Pourtant le plus fort n’est pas forcément celui qu’on croit.
Je me rapproche d’elle, on attend que le pauvre serveur en termine avec tout un groupe. Elle est stressée et je me demande vraiment pourquoi.
— Qu’est-ce qui t’inquiète autant ? Que l’Ulster perde ? Ça n’arrivera pas.
Je plaisante, mais j’espère vraiment que notre équipe va vaincre cette fois-ci et maintenir sa place de second au tournoi irlandais.
Je vois Eireen soupirer et passer les mains dans ses longs cheveux blonds détachés.
— Je ne suis pas catholique Kenan.
Je vois ce qui la préoccupe.
— Tu comptes m’épouser ? je demande.
— Non ! elle s’empresse de répondre.
Étrangement le fait qu’elle me le dise avec autant d’assurance, comme si c’était impossible, me fait mal. Ça me vexe qu’elle n’imagine pas notre relation pouvoir aboutir à un mariage. On n’en est qu’à notre sixième rendez-vous, mais je pourrai citer des dizaines de couples qui n’ont pas été si loin avant de se fiancer.
C’est surement stupide, mais ça me vexe de la sentir si réticente, après la grue, après cette nuit, après ces rendez-vous tous plus étranges les uns que les autres.
— Alors ça ne posera pas de problème, je finis par dire.
— Parce que si je comptais t’épouser ça en poserait un ?
— Évidemment, Eireen.
— Oui, évidemment où avais-je la tête !
Son regard bleu me fusille et je ne comprends plus rien.
— On est croyant et pratiquant dans ma famille. Il me renierait si j’épousais une femme qui n’est pas catholique.
Au-delà de ma famille, c’est à l’IRA que je devrais rendre des comptes si je faisais ma vie avec autre chose qu’une catholique. J’ai été élevé ainsi, dans ma foi, dans mes idées et celle de l’Irlande que je défends au péril de ma vie ce n’est pas pour une femme que je remettrais tout en question.
— C’est idiot, Kenan, quand je t’ai demandé si mon athéisme était un problème tu m’as dit que non.
— Parce que ça ne l’est pas.
Ça ne l’est pas tant que je ne tombe pas amoureux de toi, ça ne l’est pas si je n’envisage pas de faire de toi ma femme et la mère de mes enfants. Ça ne pose aucun problème si on s’amuse, si on n’investit pas nos cœurs et si on ne mêle pas les sentiments à notre histoire. On peut s’apprécier et se désirer, mais on ne peut pas s’aimer. Pas ici, pas en étant différent.
— Ça ne l’est pas tant qu’il n’y a rien de sérieux, c’est ça ? Donc quand je vais rencontrer tes parents je vais être la fille que tu baises, mais pas celle avec qui tu peux envisager ta vie et certainement pas celle que tu vas trainer dans une église pour te passer la bague au doigt !
Elle crie et les supporters présents au bar ont tous la tête tournée dans notre direction et aucun en rate notre conversation qui semble se changer en dispute. Or, cette dispute n’a pas lieu d’être puisqu’elle ne va pas m’épouser bordel !
— Qu’est-ce que ça peut faire, puisque tu ne comptes pas m’épouser.
— Il est là le problème Kenan ! Ça ne laisse aucun espoir de changer d’avis, d’envisager autre chose que…et puis c’est humiliant Bon Dieu !
Je me retiens de rire en la voyant taper du pied, elle est en rogne et j’arrive à bander parce que le rouge qui lui monte aux joues et la façon dont son regard s’illumine m’excitent.
Je la prends dans mes bras et la serre assez étroitement pour qu’elle sente à quel point elle me fait de l’effet, qu’elle soit athée ou catholique m’importe peu dans l’immédiat.
— Il n’y a rien d’humiliant Eireen, tu es athée, tu n’es pas une cause perdue.
Elle frappe ma poitrine de son poing en jurant que je vais le regretter. J’ignore comment, mais je sais qu’Eireen ne manque pas d’imagination.
— S’ils te banchent sur la religion, ou la guerre ou la politique, change de sujet.
— Pourquoi ? De ça aussi je dois avoir honte ?
— Eireen…
Elle se dégage de mes bras, l’air vraiment blessé cette fois et je me dis que je devrais surement mettre un peu d’eau dans mon vin et lui faire la place qu’elle mérite. Elle n’est pas un coup d’un soir avec qui je m’amuse, d’ailleurs je ne présente pas mes coups d’un soir à mes parents. Elle est une femme intéressante que j’ai envie d’intégrer à ma vie, mais je suis aussi réaliste sur notre histoire.
— Certains membres de ma famille ont des idées bien arrêtées concernant tout ça et j’aime autant qu’on ne termine pas la journée en bagarre.
— On peut discuter sans en venir aux mains.
— Tu ne connais pas encore toute ma famille.
Elle m’observe un instant et lorsqu’elle voit que je suis sérieux elle éclate de rire.
— L’Irlande est un sujet très sérieux chez nous.
— Désolée, dit-elle entre deux éclats de rire.
Je la reprends dans mes bras, elle peut en rire, je préfère l’entendre se moquer de moi plutôt que de me crier dessus pour mon manque de tolérance.
— Tu m’as dit être pacifiste, alors si c’est bien le cas, tu feras en sorte d’éviter un conflit inutile.
Elle hoche la tête en riant toujours, j’embrasse son front puis sa bouche. Elle se calme lorsque notre baiser devient plus profond, plus ardent et que ma langue cherche la sienne. Les bras d’Eireen passe autour de mon cou son corps se rapproche du mien et nos lèvres ne se lâchent plus. Je perds le décor, je perds ce qui nous entoure tout comme hier soir, dans la grue. Je n’ai pas une bonne mémoire pour ce genre de connerie, de premier rendez-vous, mais avec Eireen je me souviendrai certainement de notre première fois à des dizaines de mètres du sol. Je voulais l’impressionner, je voulais être celui qui lui fait découvrir Belfast vue du ciel, et c’est moi qui ai été éblouie.
Eireen me relâche et met fin notre baiser en me tendant un regard brûlant.
— Je veux que tu saches, je reprends, que tu n’as pas à te sentir humiliée, je ne présente pas beaucoup de femmes à ma famille et quand je le fais, c’est que je suis bien avec elle. Ils ne vont pas te voir comme une fille avec qui je m’amuse Eireen, mais comme une femme qui est importante pour moi.
Elle a repris son sérieux et la façon dont elle me regarde me met mal à l’aise. Comme si elle regrettait quelque chose. Je n’ai pas le temps d’essayer de comprendre, le serveur me demande ce qu’on veut et je commande 12 bières et quelques sodas pour les enfants.
Il est rapide, quelques minutes plus tard on remonte le gradin avec chacun un plateau rempli dans mes mains pour rejoindre ma famille qui chante à tue-tête en gaélique.
Dès qu’ils m’aperçoivent, ils viennent à ma rencontre pour prendre leurs verres, les plateaux se vident en deux secondes ce qui amuse Eireeen.
Mon neveu Adam me fait signe de le rejoindre. Lui n’a pas pu venir me dépouiller et je lui apporte son soda. Il est installé sur un siège, les jambes recouvertes d’une couverture alors qu’il ne fait pourtant pas froid. Il fait même soleil aujourd’hui, un bon jour pour que l’Ulster massacre Leinster.
J’embrasse mon neveu, sa mère n’est pas encore arrivée, elle doit finir vers 16h à la caisse du supermarché ou elle travaille. Mon père s’est chargé de le prendre en charge, on ne peut pas transporter son fauteuil dans le stade alors avec mes frères, ils le portent jusqu’ici.
Adam sourit à Eireen qui s’assoie à ses côtés.
— Eireen, je te présente Adam, l’ainé de mes neveux, le fils de ma sœur Clare qui n’est pas encore là.
Adam tend la main et l’infirmière lui serre comme à un adulte. Adam est un peu timide lorsqu’il ne connait pas les personnes, mais Eireen le met directement à l’aise avec son sourire et en lui parlant rugby. J’assiste bouche bée à leur conversation sur les statistiques de l’Ulster et leur chance de gagner le match de cet après-midi.
Adam finit par se tourner vers moi, son pouce levé pour me signifier qu’elle est géniale. L’infirmière se lève et je l’entraine pour la présenter au reste de ma famille.
Je la regarde serrer des mains, faire des bises et être aussi à l’aise que possible sous les commentaires stupides de mes frères et les interrogations des membres féminins de ma famille. Elle est stupéfiante et je suis remplis de fierté qu’ils la découvrent ainsi.
Eireen termine de les saluer et nous nous trouvons deux places entre Adam et mon frère Eoghan.
— Je t’ai épaté O’Shea.
— Totalement.
— Ils sont plutôt accueillants, elle lance en remuant des épaules.
Je me tourne vers mes parents assis derrière nous, ma mère me fait un clin d’œil et souris en désignant Eireen.
— On en reparlera après le diner, je conclus.
Les équipes entrent sur le terrain, Eireen me lance ce foutu regard de défi. Celui qui ne manque pas de me faire bander, et je l’imagine déjà à la table des O’Shea, tenir un débat avec Eoghan, répondre aux blagues stupides de Rory et tenir tête à ma sœur Clare qui ne manquera pas de lui trouver des défauts. Eireen est faite pour affronter les O’Shea, elle est faite pour les combats.
Elle a l’âme d’une guerrière et l’esprit d’une pacifiste. Et je me demande en la regardant ce qu’elle penserait de moi si elle savait que je fais exploser des bombes, que mon combat n’a rien de pacifiste, qu’il ne se fait pas lors de ses marches qui ne servent à rien, mais que je prends les armes pour affirmer ma façon de vivre et ma liberté ? Qui prendrait le dessus, la combattante ou la pacifiste ? Je me le demande et en même temps je n’ai pas envie d’avoir la réponse. J’ai simplement envie qu’Eireen soit là, qu’on soit tous les deux ou lors de ces moments, mais la guerre je la garde pour moi.
Commentaires
Aie aie aie
Quand la vérité va exploser ça va faire mal !
Merci pour ce chapitre
Bon il m'a fallu du temps ( car l'IRA Ca me parlais pas trop) mais depuis 2 chapitre j accroche a l histoire maintenant. J'aime le caractere et la repartie de eireen. Ca promet entre les 2. Mais je sens qu'on va encore pleurer avec cette histoire
Nous nous rapprochons du moment fatidique : la vérité sur Eireen.Je suis déjà triste pour Kenan, lui qui a déjà des remords de lui cacher son combat.
Pour le moment, c est une très belle histoire qui se met en place.....
Encore un chapitre magnifique !!! Et La partie Dans Le bar Entre eux, Génial. Car il faut qu'elle cache qui Elle Est vraiment. Merci de vos chapitres que je dévorent !!!
Sa va commencer à être compliquer pour cacher chacun leurs combats... sa promet un véritable suspense comme d'habitude mais hâte de lire la suite en tout cas...