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  • Légion #2, Epilogue

    Épilogue

    Tristan

     

     

    Cinq ans plus tard.

    30 Avril 2018, Fête de Cameron.

    Camp Raffalli, Calvi, Corse.

     

     

    Je termine de saluer mes hommes en les félicitant pour le défilé. La cérémonie vient de se clôturer au Camp Raffalli où nous venons de fêter un an de plus à la Bataille de Camerone. Les festivités vont pouvoir commencer.

    Je cherche du regard si je vois mes proches. Mes parents doivent être venus avec Ezra et les siens. Notre compagnie est rentrée quelques jours avant Camerone d’une OPEX dont je suis bien heureux d’avoir terminé. C’était compliqué et difficile. Le genre de mission dangereuse qui rappelle de mauvais souvenirs.

    Même si on est des fous d’adrénaline, que d’une certaine façon, on aime aller à la guerre et servir la France, quand on prend de l’âge, avec l’expérience, on est simplement content de retrouver les siens après de longues séparations.

    Je n’ai pas besoin d’attendre bien longtemps, j’en connais une qui dès qu’elle a dû recevoir le feu vert, s’est mise à arpenter la place d’armes à ma recherche.

     

    — Papa !

     

    Je me tourne en entendant une voix d’enfant qui m’est plus que familière. Je découvre une tornade brune qui courre dans ma direction, un immense sourire déformant son visage d’ange, ses yeux bleus sont brillants de joie.

     

    — Livia, ma puce !

     

    J’éclate de rire en voyant la tenue de ma fille. Ma mère lui a effectivement fait son costume de parade qu’elle nous réclame depuis des mois.

    Livia continue de courir en riant, j’en profite pour l’observer.

    Elle a une ceinture bleue autour de la taille, des épaulettes semblables aux miennes, le tissu de sa robe est beige, et vert. Un adorable chapeau qui ressemble à mon képi trône fièrement sur sa petite tête. On dirait une version miniature d’un Repman en jupe.

    Je la prends dans mes bras quand elle arrive à ma hauteur pour la soulever. Elle ne pèse trois fois rien. Dès qu’elle est à hauteur de mon visage, ses petites mains encerclent mon cou et elle commence à me faire plein de bisous en riant.

     

    — Tu m’as manqué ! je lance à ma fille.

     

    — Toi aussi, papa !

     

    Je reviens de quatre mois d’OPEX en Syrie. On a envoyé fin 2017, des troupes militaires faire face au conflit grandissant des menaces terroristes de plus en plus présentes.

    Je ne dis pas que ça a été simple, c’est faux. La Syrie et l’Irak sont pires que l’Afghanistan. On voit des choses affreuses, on assiste à des affrontements d’une rare violence avec des hommes qui ne reculent devant rien. Les gens se rendent compte de l’importance des forces armées, même si tous ne sont pas d’accord avec nos agissements, la guerre contre le terrorisme est très médiatisée. Mais comme dans n’importe quel conflit, on ne parle que de ce qui est supportable pour la population, certaines horreurs sont tues, certains massacres et discriminations des populations sont mises sous silence également.

    Je continue de parler avec le Capitaine Louis Wagner, qui est devenu au fil des années, un véritable ami. Les choses n’avancent pas tellement concernant le traitement des SSPT. On a envoyé trois gars voir Wagner au cours de ses dernières années, les autres attendent de quitter la Légion ou d’atteindre le point de non-retour pour craquer. Parce qu’un roc finit toujours par s’effondrer en voyant ce que nous voyons, en vivant ce que nous vivons. Certains mettent des années à déclencher des signes que leur limite est atteinte. D’autres non.

    Mais ce contrôle total n’aide pas à extérioriser ce qu’on nous demande de taire et d’oublier.

    Je reconnais que l’aide du doc m’a permis de garder la tête sur les épaules suite à mon premier retour d’Afrique après Djibouti. Mais surtout, c’est de savoir que je n’avais pas le droit de flancher à nouveau parce que j’avais une famille qui m’attendait, qui comptait sur moi, m’a véritablement aidé. Certaines choses ont changé par rapport à mes premières années en tant que légionnaire. Surtout en ce qui concerne les missions et ce qui s’y passe.

    Ezra sait beaucoup de choses, certaines dont elle ne devrait pas savoir, mais ma femme est une tombe, une prison qui enferme les maux et prend soin de celui qui les porte.

    Livia commence à toucher mon képi, je fais de même avec le sien. On se taquine, elle rit et je savoure ce moment en tête à tête.

     

    — Plus tard, je serai légionnaire ! m’avoue Livia.

     

    — Avec ce charmant uniforme, tu as toutes tes chances, ma puce !

     

    Je commence à marcher dans la foule pour essayer de trouver sa mère. Nous n’avons pas pu nous voir avant aujourd’hui. Ezra était à Nice chez mes parents, mon frère Yoann était en pleine mission Sentinelle, ma petite sœur entre deux sorties entre filles et la fac de droit voulait voir sa nièce. On s’est croisé. Mais quoi de mieux que des retrouvailles aujourd’hui, alors que c’est un jour de fête.

    Je cherche Ezra parmi les visages inconnus, il y a beaucoup de monde cette année, je suis surpris.

     

    — Maman elle dit que tu es très beau aujourd’hui, m’explique Livia en tripotant mes insignes.

     

    — Maman trouve toujours que je suis beau, je réponds sans l’ombre d’une modestie.

     

    Livia me dévisage en prenant un air absolument pas convaincu.

    Ma fille m’a fait un bien fou. Je ne pensais pas qu’avoir un enfant me rende à ce point fier et heureux. Elle a tout basculé en arrivant. Comme sa mère, Livia m’a rendu dingue à la minute où je l’ai pris dans mes bras.

    Quand je la vois, elle me montre que le monde est encore beau et innocent. Elle me donne la motivation pour me battre encore et encore pour la savoir en sécurité.

    Livia est une raison de plus de s’accrocher quand je me retrouve dans un sacré merdier. Comme Ezra, elle représente ma paix, ma maison, et ce sentiment bouleversant d’appartenir à une famille aimante.

    Bien sûr, depuis sa naissance le soir de Noël, il y a toujours cette peur de briser le cœur de ma petite fille. Souvent je marche sur du charbon brûlant. Mais Livia est une enfant courageuse qui comprend beaucoup de choses. Nous ne lui cachons rien avec Ezra. Elle sait que son père fait un métier dangereux, elle apprend à vivre avec mon absence en savourant les moments où nous sommes tous réunis. C’est compliqué pour tout le monde, mais pas impossible. Livia m’amuse quand elle me dit : « je n’ai pas peur, parce que tu reviens toujours. ».

    Elle me rend fier, c’est mon carburant lorsque les choses deviennent compliquées. Je sais que ce n’est pas facile pour elle, comme ça ne l’est toujours pas pour Ezra. Savoir que je m’en vais, dans un autre conflit semblable à celui en Afghanistan pour combattre des hommes sans pitié.

    Ses copines ont un papa présent tous les jours, parfois, nous ne nous voyons pas pendant plusieurs mois, c’est très long pour elle, comme pour moi. Mais fonder une famille est dans l’ordre des choses, fonder une famille dans notre situation, c’est montrer aux autres que nous sommes comme eux, c’est se donner une raison de plus de se battre pour rentrer indemne. C’est un tout, une force qui peut se transformer en faiblesse, mais qui apporte tellement.

    Je me fige en sentant un corps se coller dans mon dos, suivis de deux mains froides se poser sur mes yeux, Livia rigole. Une voix féminine et très sexy résonne :

     

    — Alors, Adjudant Vial, on ne vient pas saluer sa femme ?

     

    — J’étais justement en train de la chercher, chef.

     

    — C’est vrai ! confirme Livia.

     

    Ezra s’écarte, je me tourne, pose Livia qui râle un peu. Je retrouve ma superbe corse. Ezra est magnifique, toujours aussi attirante, expressive et courageuse. Elle possède toujours son fort caractère et continue de me soutenir autant qu’elle me passionne.

    Je viens d’être nommé Adjudant, j’ai pris la tête de la section 2 depuis cinq mois. C’est étrange, mais ça me plait, je ne me verrais pas faire autre chose. Ma femme était presque plus heureuse que moi lorsque j’ai appris la nouvelle.

    Je lui souris, elle fait de même, je l’attire contre moi en passant une main autour de sa taille. Je retrouve son odeur gagne mes sens, je me penche pour l’embrasser. Nos bouches se retrouvent, un frisson nous gagne. La tension des retrouvailles mêlant désir est toujours aussi explosive.

    C’est nous.

    Je sais très bien qu’Ezra a déjà marchandé avec ses deux pères pour qu’ils nous gardent la petite toute la soirée, histoire qu’on se retrouve seuls quelques heures à profiter de l’autre et à user de notre devoir conjugal.

    J’essaie de la convaincre depuis deux ans d’avoir un autre enfant, mais la photographe au caractère bien trempée ne se laisse pas convaincre facilement, ça m’offre mainte et mainte possibilité de la travailler au corps. Je crois qu’au fond, elle aimerait profiter encore de Livia seule avant d’accepter qu’un autre mini Repman vienne squatter neuf mois.

    Sa main caresse ma joue, je sens déjà que sa proximité ne me laisse pas indifférent. Le temps passe, mais les sentiments qui nous lient ne s’estompent pas. J’ai l’impression que plus c’est fort. Je suis mordu d’elle.

     

    — Hé ! proteste notre fille de sa petite voix d’enfant, en secouant mon pantalon.

     

    Ezra rompt notre baiser en souriant contre ma bouche avant de jeter un coup d’œil un brin sermonneur à Livia. Quand on a deux femmes à la maison, il faut savoir leur partager le même temps. Si durant mon absence, elles sont collées l’une à l’autre comme deux sangsues, quand je reviens, elles adorent se livrer bataille.

     

    — Prête-moi ton père deux minutes.

     

    J’embrasse ma femme encore et encore en savourant le plaisir de la retrouvant. Elle m’a terriblement manqué. Même si nous cultivons l’art des lettres, des mails et des appels Skype tard le soir, c’est différent. Ça ne remplace pas sa présence, mais ça entretient la flamme.

    Je la regarde avec admiration, je mémorise de nouveau chacun de ses traits, ses yeux bleus qui brillent, sa peau blanche qui sera bientôt bronzée, ses cheveux noirs qui s’ondulent.

    Je suis fou d’elle, je ne lui dis pas souvent parce que malgré les années, certains mots sont toujours complexes pour moi, mais elle le sait, et je lui prouve. Je suis tellement fier d’elle, de ce qu’on a accompli ensemble durant ces cinq dernières années.

    Ezra continue les reportages à travers le monde sur des périodes plus courtes pour ne pas laisser Livia seule trop longtemps.

    On essaie de s’organiser entre nos deux métiers pour passer du temps tous ensemble le plus possible.

    La photographe vadrouille dans divers endroits plus beaux les uns que les autres. Je sais qu’un jour, la Corse voudra retenter l’expérience de rapporteur sur le terrain. Je me prépare doucement à cette idée. Pour l’instant, je fais mon possible pour l’éloigner et avec l’actualité, elle est plutôt raisonnable.

    Avec Livia, lorsque je ne suis pas là, elles continuent de créer ma grosse boite à souvenirs. M’emportant avec elles dans leur quotidien. Désormais, il y a six boites à polaroids.

    Les choses n’ont pas tellement changé en cinq ans. Savio travaille toujours pour le STARSO où il a pris des fonctions plus importantes. Le Corse s’est remis à chanter. James parcourt l’Europe pour jouer du piano, alternant entre composition et concert. Les deux hommes sont très présents dans notre vie et je ne saurais jamais comment les remercier suffisamment.

    Mes parents que j’aperçois nous faire signe restent tranquillement sur la Côte d’Azur. Mon frère est devenu Sergent de l’armée de terre française. On se croise quand on peut.

    Dario et Lésia font toujours partie de notre vie, l’autre belle corse a rencontré quelqu’un de proche à mon existence de militaire. Je n’en reviens toujours pas. Et Dario continue ses vadrouilles.

    On peut dire que nous sommes heureux même si tout n’est pas simple, même s’il y a des jours compliqués, des conflits, des problèmes à surmonter. On a atteint le pire, on sait gérer le reste.

    Je récupère ma fille dans mes bras, il n’en faut pas beaucoup à cette enfant pour être satisfaite. J’attrape la main de ma femme et nous rejoignons notre famille.

    On salue tout le monde, on échange quelques banalités avant de laisser notre fille aux bras de ses grands-parents pour s’éclipser quelques minutes.

    Avant que Livia nous repère, j’amène la photographe dans un coin tranquille pas trop éloigné, mais suffisamment pour profiter d’un instant encore en tête à tête. Je regarde qu’aucun gradé ne soit dans les parages, et me lance.

    Ezra me sourit lorsque son dos heurte le mur. Ses bras se nouent autour de mon cou, on se colle l’un à l’autre, c’est plus fort que moi, j’ai envie d’elle.

     

    — On ne saute pas cette année ? me demande-t-elle, taquine.

     

    Je souris à mon tour.

     

    — Comme une envie de s’envoyer en l’air, Madame Vial ?

     

    — Toujours, Repman, toujours.

     

    Sa main caresse ma joue.

     

    — Je t’aime.

     

    J’inspire en savourant l’effet que ces deux mots ont sur moi.

     

    — Moi aussi.

     

    Je profite de ce moment de calme avant d’aller passer la journée avec ma fille pour faire diverses activités.

    Je regarde Ezra qui fait de même, je la surprends à compter mes dix doigts en me scrutant avec attention pour vérifier que je suis toujours entier. Elle n’a pas changé.

    Je finis par l’embrasser de nouveau, puisque je ne peux rien faire d’autre.

    Un jour Ezra m’a écrit que je n’étais pas seulement un grade ni un matricule, que j’étais un homme en plus d’être un légionnaire.

    Dorénavant, elle m’a apporté la fierté d’être un mari et un père. Elle m’avait dit que je faisais partie du cercle très fermé des héros. Je n’ai pas besoin d’être le héros d’un monde, tant que je suis le leur, tout me va.

    Et comme dit ma mère avec son air sérieux, l’amour triomphe de tout, même de la guerre.

     

     

    FIN

     

     

    AMHELIIE

  • Fucking Love #1 - For Play - Epilogue

    Epilogue

    Dereck

     

     

    Je tourne mes clés dans la serrure quand mon portable se manifeste dans ma poche. Je le sors en ouvrant la porte, je vois que c’est Vinz. Mon frère tente de me joindre après que j’ai trouvé le courage de l’appeler pour lui raconter ce qu’il s’était produit la semaine dernière à Chicago.

    J’attrape mon sac et au moment où je m’apprête à décrocher pour lui dire de me rappeler demain, je me reçois un violent coup de poing.

    Je recule en chancelant, désorienté. Du sang s’échappe de mon nez. La douleur est fulgurante.

    Je n’ai pas le temps de faire quoi que ce soit que l’assaillant me décroche un autre coup de son droit qui me fait perdre l’équilibre. Je heurte le sol, mon portable s’éclate par terre dans un bruit étouffé par celui de mon corps. Ma tête cogne le parquet de l’entrée de mon appartement. Tout le côté droit de mon visage me brûle. L’odeur du sang annihile mes sens. Je suffoque alors qu’il glisse dans ma bouche. Je crache, je tente de respirer mais mon agresseur ne m’en donne pas le temps.

    L’intrus se met à ma hauteur, il m’écrase de son poids. Ma vue redevient plus nette, je vois un homme imposant, cagoulé, vêtu de noir. La silhouette est imposante.

    Je me débats, mon poing part heurté l’inconnue. Une lutte violente commence. Je tente de prendre le dessus, de le faire basculer sur moi pour le frapper en retour, mais mon agresseur cagoulé m’assène un coup d’une telle violence que ma tête part heurté le sol.

    Une de ses mains agrippe mon t-shirt et il frappe. Encore et encore.

    Le choc est là, l’adrénaline me parcourt. Je m’ordonne de réagir, je suis capable de me battre, mais le mec me domine à présent.

    Je ne comprends pas ce qu’il m’arrive. Je suis sonné, les coups sont si forts que ma tête tourne. Ma vue se brouille, j’essaie de respirer mais l’air ne semble pas entrer.

     

    — Tu as perdu, lance une voix grave. Et tu vas chèrement le payer.

     

    Et l’homme cogne, il frappe encore. Mon visage s’ouvre, des plaies s’y forment et je saigne. Je me demande ce qu’il m’arrive. Pourquoi on me fait ça, et quelle force faut-il pour mettre KO un gars comme moi.

     

    — Cette fois-ci, ce sera bien réel, tu as voulu jouer, tu as perdu, poursuit cette voix qui me semblerait familière à présent.

     

    Et je comprends. Ce n’est pas le fruit du hasard, c’est quelqu’un que je connais. Ces menaces ne sont pas l’œuvre d’un fou, mais du passé : des membres de SPIT OR SMALOW. Puisque j’ai refusé de me plier à leur menace à Chicago, ils ne perdent plus de temps. Bravant les menaces de mon frère, bravant les interdits et les risques.

    Mon agresseur est missionné pour ça.

    Bordel, il est venu chercher la cassette.

     

    — Garrett, je murmure en crachant du sang, ne fait pas ça.

     

    Je ne reconnais même pas ma voix. J’entends un rire. Malgré ma vue trouble, je vois clairement mon agresseur brandir ce qui me semble être une seringue.

    Mon cœur s’emballe, je me débats, je ne veux pas de ça. J’essaie de me tourner pour ramper et échapper à Garrett, mais ce dernier me saisit par le t-shirt et plante dans mon bras l’aiguille du destin. Il se penche à mon oreille, je sens son souffle et sa cagoule se frotter à ma peau alors qu’il m’assène pour de bon le coup de grâce.

     

    — Bon retour en enfer, Dereck.

     

    Je sens le produit se dissiper dans mes veines, l’effet est tellement rapide, je proteste, mais ma voix ne résonne plus. Je sens seulement l’aiguille qu’on me retire du bras, suivis de l’absence du poids de Garrett sur moi. Vient le bruit des objets qu’on retourne et brise. Il fouille. Il la cherche, cette cassette, mon unique preuve de liberté.

    Et je ne peux pas la défendre. J’espère seulement qu’il ne la trouvera pas.

    Comme dans mes souvenirs les plus sombres, la magie de la drogue s’opère. Mon système nerveux se détend, ma respiration ralentit, une sensation agréable commence à noyer les douleurs de mon corps passé à tabac. Les battements de mon cœur se font moins rapides et dans un élan de lucidité, je me demande si mon agresseur ne m’a pas injecté une dose trop conséquente et si mon corps supporte encore la drogue après tant de temps sans en avoir eu.

    Lorsque mes yeux se ferment pour me faire tomber dans l’inconscience, je sais pertinemment qu’à mon réveil, ce sera pire. Mes démons seront de retour, ainsi que le manque et la folie.

    Surtout la folie. Et c’était le but recherché, que je redevienne cet homme que j’ai détesté être et qui a failli me détruire… si je survis à cette nuit.

     

     

    AMHELIIE

     

    À suivre.

  • Fucking Love #1 - For Play - Chapitre 18

    Chapitre 18

    Jax

     

     

     

    Je termine de raconter à Mackenna devant un café ce qu’il s’est produit ce week-end. Le rapprochement inévitable avec Dereck, notre virée dans Chicago à découvrir ce que ça faisait d’être avec un homme, près d’un homme, de toucher un homme et même plus que ça.

    Je lui ai confié l’audace de Dereck en me proposant son deal et le reste. Mack est restée sans voix quand je lui ai dit ce qu’il s’était produit la nuit même. Elle a rougi à la mention de certains détails et je voyais qu’elle mourrait d’envie d’en avoir plus. J’ai ri en lui disant qu’elle avait même eu la chance de voir ce que ça donnait en live, alors pas besoin de détailler.

    Je lui ai fait le débriefing de la cérémonie et j’ai montré en photos ma statuette qui restera dans ma loge au studio. Puis, j’ai raconté la partie la moins sympathique du week-end : celle où j’ai ramassé mon partenaire chancelant, terrorisé et en proie à une crise de panique. J’ai compris que les choses avaient dérapé et que Dereck cachait des secrets qui l’avaient profondément marqué. Il a un passé plus inquiétant que la drogue, et quand je l’ai vu dans cet état, si faible alors qu’il semble si fort en apparence, j’ai disjoncté intérieurement. Ça m’a fait mal de le voir ainsi. J’ai ressenti le besoin de prendre soin de lui. De le protéger de toute cette merde et de lui prouver qu’il pouvait compter sur moi.

    Dereck ne m’a pas parlé. Il s’est endormi et au petit matin, il avait disparu en me laissant un simple texto disant qu’on se retrouvait pour le départ. Dans l’avion, il était tellement tendu que je n’ai pas osé lui parler. Je lui ai simplement tendu un écouteur et on s’est maté la suite de la série avec les pompiers.

    Ce n’est que lorsqu’il m’a ramené chez moi, dans un silence pesant où je me torturai l’esprit pour savoir comment l’aborder, que mon partenaire m’a demandé de lui laisser le temps d’encaisser tout ça. Quand je l’ai interrogé pour savoir s’il comptait m’en parler, il m’a confié qu’il réfléchissait à ça aussi.

    On s’est quitté furtivement, mais Dereck a osé me saisir par le bras et m’attirer à lui pour m’embrasser chastement et déclencher des putains de frissons dans tout mon corps.

    Ensuite, il s’est renfermé et il m’a lâché un simple « à bientôt », qui semblait être un « à dans longtemps ». Je n’ai pas envie qu’on fasse machine arrière, pas lorsque j’avance.

    Je ne veux pas que Dereck s’échappe parce qu’il pense que je ne suis pas bien pour lui. C’est moi qui ne vais pas dans l’histoire, c’est moi l’hétéro flippé.

     

    — Je n’aurais pas cru que ce week-end prenne cette tournure, j’avoue.

     

    — Qu’est-ce que vous vous êtes dit au final ? m’interroge Mack en torturant son café.

     

    Je soupire en sentant son regard sur moi.

     

    — Il m’a dit que je devais réfléchir à tout ça, que je devais prendre le temps de penser à ce qu’il pouvait se passer. Et Dereck semble d’accord pour m’attendre. Pour essayer, même si…

     

    Je me tais un instant en pensant à ce que Dereck m’a dit, à ce qu’il serait capable de tenter, juste pour moi, juste pour essayer, pour ne pas me brusquer et apporter le regard des autres sur moi.

     

    — Même si c’est caché, je conclus, un peu honteux d’imposer ça.

     

    Mais quand je pense à Sage, pour le moment, ça me ferait faire machine arrière et je ne peux pas. J’ai besoin de Dereck plus que je ne le voudrais. C’est tout ce que je craignais mais qu’importe.

     

    — Putain, je ne m’attendais pas à ça, souffle Mack en souriant.

     

    Elle semble heureuse pour moi, et je suis moi-même surpris du bilan de ce week-end qui m’a ouvert les yeux sur certains points.

     

    — Moi non plus.

     

    — Et qu’est-ce que tu as ressenti ? Je veux dire, face à une pareille déclaration.

     

    Je souris en passant une main dans mes cheveux bruns.

     

    — C’était le bordel le plus total, mais j’ai aimé ça. J’ai aimé quand il m’a dit que c’était plus que de l’amitié.

     

    Merde, comme un adolescent, mon cœur s’emballe en y repensant. Ce moment dans la piscine m’a provoqué des sensations de dingue.

     

    — Mon quatrième partenaire est tombé amoureux de moi alors que je n’ai rien fait pour si ce n’est être moi. Et pour la première fois depuis Bell, je crois que j’aime ça. Même si c’est un homme, ce n’est pas comme ça que je le vois. Je le vois lui. Lui et lui seuls, je constate en regardant Mack.

     

    C’est Dereck. Il y a une telle alchimie entre nous, une telles attraction et attirance. Je n’ai jamais ressenti ça. Et puis, au fil des mois semble s’être tissé des « un peu plus que ça ». Ce week-end à Chicago m’a ouvert les yeux sur ce que je ressentais. Même si mon naturel inquiet désire prendre le dessus, être avec Dereck m’a montré une autre réalité. Celle d’être avec quelqu’un qui vous veut en étant prêt à faire n’importe quoi pour ça.

    Aujourd’hui, malgré les zones sombres qui entourent encore l’Australien, je crois que je me laisserai à essayer. Parce que c’était bon, parce que ça me semblait vrai, parce que quelque chose au fond de moi me disait de le faire, de ne pas réfléchir et de céder. Je le voulais.

     

    — Réfléchis alors Jax, mais ne réfléchis pas trop, se contente de me conseiller Mack en jouant avec le piercing à sa lèvre.

     

    Ma meilleure amie blonde glisse une main dans mes cheveux, puis sur ma nuque et s’approche pour m’embrasser.

     

    — Tu mérites d’être heureux à présent, même si c’est avec un homme. On s’en fou des étiquettes. Tu es toi. Tu aimes qui tu veux. Et ta fille sera heureuse si tu l’es, ne l’oublie pas.

     

    Le silence suit ses propos qui demeurent en moi, je vais réfléchir c’est certain. Au mieux et pour tout le monde.

    Très vite, ce dernier interrompu par des bruits de pas et une voix enfantine qui m’avait beaucoup manqué. Je vois apparaitre Sage, en short et t-shirt panda, des couettes sur la tête qui ne sont pas au même niveau, son visage a subi quelques coups de crayon.

     

    — Papa regarde mon dessin.

     

    Je la prends sur mes genoux et elle me montre ce qu’elle vient de dessiner. Ma fille était contente que je rentre, elle ne m’a pas lâché d’une heure avant de partir vaquer à ses occupations tel un enfant de son âge.

    On discute de tous et de rien pendant un moment avec Mack, jusqu’à ce que Sage me parle de roue géante et de pomme d’amour bien rouge.

    J’adore cette gosse, elle a le don de soumettre une demande de façon intelligente sans que ça semble en être une.

     

    — Sage ? je demande l’air de rien.

     

    — Hum ?

     

    Ma fille se tourne pour me faire face, ses deux petites couettes manquent de fouetter mon visage.

     

    — Ça te dit si on va ce soir à la fête foraine ?

     

    Ses beaux yeux bleus s’illuminent, demain, il y a école, mais on ne rentrera pas tard et je crois que j’ai envie de me faire pardonner mon absence.

    Sage descend de mes genoux en sautillant, elle fait le tour de la table sous le rire de Mack. Puis, elle se fige, comme si elle percutait quelque chose.

     

    — Avec qui ?

     

    La grande question.

    Mack me jette un coup d’œil et je sens venir l’embrouille.

     

    — Dereck voyons, commente-t-elle.

     

    Traitre.

    Je secoue la tête, il m’a demandé de souffler quelques jours lui aussi, de prendre le temps de penser à tout ce qu’il s’était produit. J’ai accepté, ce n’est pas pour que quelques heures après notre séparation.

     

    — Ah oui, Dereck ! Papa, s’il te plait, appelle Dereck !

     

    Sage me supplie du regard en sautillant.

     

    — Ma puce…

     

    — Ou Demon ! ça fait longtemps que je n’ai pas joué avec ses cheveux, Demon me manque, il est drôle.

     

    Les gosses !

    Mack se retient de rire. Demon n’est pas celui qu’on qualifierait de plus drôle. Je doute d’ailleurs qu’il accepte de venir. Il s’est fait plus distant depuis un bon moment, je ne le croise qu’au boulot, et toutes les façons de m’ignoraient étaient exploitées. On verra si la carte Sage marchera.

     

    — J’appelle Demon, ma puce.

     

    Avant qu’elle ne me demande de faire pareil avec Dereck, je me lève pour quitter la cuisine et prendre mon portable pour téléphoner à l’Hardeur. En espérant qu’il ne me repousse pas encore. Parce que malgré tout, cet enfoiré me manque.

     

    ***

     

    Je fais signe à Sage depuis le carrousel, elle s’éclate comme seul un enfant peut le faire en s’imaginant en princesse allant sauver son prince charmant.

    Je m’assois à côté de Demon. À ma grande surprise, il m’a répondu et quand je lui ai soumis l’invitation de Saga avant qu’il trouve une excuse bidon pour me fuir, il m’a dit oui.

    Avoir une gamine adorable aide bien.

    Je dévisage mon meilleur ami, ses traits fermés, ses cheveux noirs aux mèches rouges, ses vêtements sombres et cette impression qu’il va exploser d’une minute à l’autre.

    Il est plutôt calme en tenant la pomme d’amour de Sage.

     

    — Alors avec Archer ? je demande en essayant de découvrir ce qu’il ne va pas, maintenant que c’est moins le bordel dans ma tête.

     

    Mais Demon se raidit à la mention de son partenaire. Il ne me regarde pas et reste fixé sur Sage qui tourne et rit toute seule.

     

    — Il n’y a rien, soupire-t-il en serrant la mâchoire.

     

    Un rire amer me gagne, ce sont des conneries.

     

    — Arrête, j’ai passé le week-end avec lui. Il était ivre la moitié du temps, il faisait n’importe quoi. Ça ne lui ressemble pas. Et j’ai l’impression que vous vous êtes éloignés depuis quelque temps. Pourquoi mec ? Pourquoi tu t’es mis à l’écart ? Je croyais que ça allait mieux…

     

    À propos de la drogue aussi. Demon est comme Dereck, il a eu un passé merdique, plongé dans la drogue et la violence, et il y a quatorze mois, il a fait une violente rechute qui l’a mis très mal. Archer l’a aidé et ils s’étaient rapprochés… jusqu’à un stade que j’ignore, jusqu’à ce que quelque chose ait tout fait basculer.

    Demon ne me dit rien, mais je sais qu’il m’écoute. Il faut juste que je trouve les bons mots pour déclencher une réaction chez lui.

     

    — Je te connais Dem, je reprends, et depuis quelques mois, t’es… étrange. Et j’ai compris après beaucoup de réflexion, que c’était depuis l’arrivée de Dereck. Pourquoi ?

     

    Je ne suis pas aveugle et les autres non plus. Archer surtout, et la fois où Demon m’a surpris quittant la loge de mon partenaire m’a émis une hypothèse que je veux confirmer.

    Contre toute attende, Demon délie sa langue, sans me regarder, les yeux braqués sur ma fille, il se contente de me demander :

     

    — Qu’est-ce que tu sais réellement de ton nouveau partenaire, Jax ? Mis à part qu’il était autant camé que moi ?

     

    Le ton de Demon est beaucoup trop sombre pour laisser présager quelque chose de bon.

     

    — C’est-à-dire ? je l’interroge en croisant les bras.

     

    — Tu sais que c’est un Hardeur.

     

    — Oui.

     

    Demon inspire en me jetant un coup d’œil sérieux et inquiétant.

     

    — SPIT OR SMALOW appartient également à mon ancien label.

     

    Je me fige en encaissant ses propos. Il a bien dit que…

    Oui Jax, il l’a dit.

     

    — Est-ce que t’es en train de me dire…

     

    Demon m’interrompt dans la foulée sans exprimer la moindre compassion.

     

    — Il était avec moi durant deux ans chez SHADOWS HOUSE.

     

    — Tu déconnes ! j’explose d’une voix virulente.

     

    Mon meilleur ami hausse un sourcil en laissant échapper un soupir amusé. Néanmoins, je sens la tension grimper en flèche chez lui. Il serre la pomme d’amour à peine mangée de ma fille en lâchant sèchement :

     

    — J’ai l’air ?

     

    Je ferme les yeux en encaissant sa révélation. Je me souviens d’un soir chez moi, alors qu’on était tous les trois avec Archer et que Demon s’est mis à nous parler de son passé avec une bière de trop de nez. Le porno trash, BDSM et violent, la drogue dans laquelle il était tombé, les choses qu’il avait dû faire.

    Pourquoi je n’ai pas fait le lien plutôt !

    Parce que Demon n’a jamais dit qu’il avait habité à Miami.

     

    — Il ne t’en a pas parlé, c’est ça ? me fait remarquer Demon avec sarcasme.

     

    Je secoue la tête en jetant un coup d’œil à ma fille qui tend un autre ticket à la dame du manège en nous faisant « coucou ».

    L’organe dans ma poitrine se serre, les révélations de Demon me laissent perplexe.

     

    — Jax ?

     

    — Ouais ?

     

    Demon me regarde et je lis le malaise en lui. Ses traits durs sont encore plus marqués. Il hésite et finit par m’avouer quelques instants après :

     

    — Quand je suis parti, il est resté. Je ne sais pas comment il s’est sorti de ça, Jax, je ne sais pas, mais… moi j’ai dû faire des choses extrêmes pour m’en aller.

     

    Du genre ? Mais je n’ose pas poser la question vu la tête que tire Demon.

    Je me tais durant un instant, réfléchissant à ce que je viens d’apprendre, puis la colère me gagne.

     

    — Pourquoi tu m’en parles maintenant seulement ! je déclare, contrarié.

     

    Demon se met à rire en frottant ses cheveux.

     

    — Parce que tu as la même tête qu’Archer, en ce moment !

     

    — C’est faux.

     

    Demon secoue la tête, pensant l’inverse de moi. L’atmosphère entre nous explose la seconde d’après, sans que je ne puisse le prévoir. Mon meilleur ami s’emporte, sa voix devient dure et il perd son calme.

     

    — Tu veux que je te dise la vérité ? T’es exactement comme Archer, sauf qu’il a les couilles de l’assumer. T’es hétéro, OK ce n’est pas simple pour toi. Mais vous voulez deux personnes qui ne sont pas stables ! Dereck s’en sort visiblement mieux que moi, mais la réalité est là : on est déglingué. Ce n’est pas un gars pour toi. Est-ce que t’as une idée de ce qu’on tournait là-bas Jax ? Mis à part ce que je t’ai raconté ?!

     

    Il insiste en me foudroyant du regard. Bien sûr que j’ignore le reste, mais je sais qu’il y a autre chose. Et c’est ce qui est le plus compliqué : savoir les gens qu’on aime dans la détresse sans moyen de les aider.

     

    — Alors, pose-toi les bonnes questions, Jax, pose-toi-les et pose-les à Dereck.

     

    Sur ces mots, il me tend la pomme d’amour de ma fille que je récupère et se lève.

     

    — Tu m’excuseras auprès de Sage, mais je dois rentrer, je dois… rentrer.

     

    Et avant que je puisse le retenir, Demon se met à marcher rapidement, je le perds dans la foule et je comprends que je viens de remuer des choses sans doute plus douloureuses que je ne le pensais, comme Dereck en a remué en venant ici.

     

    ***

     

    Une semaine plus tard...

     

     

    — Allô ?

     

    — Enfin ! je réponds d’une voix parsemée de reproches.

     

    Silence de l’autre côté du téléphone. Un soupir finit par résonner quelques instants plus tard.

     

    — C’est traitre de m’appeler du numéro de ta baraque alors que je ne l’ai pas d’enregistré, souligne Dereck sur un ton grave.

     

    — Tu me filtrais.

     

    Dereck laisse échapper un rire. Je l’ai piégé comme un gosse mais au bout d’une semaine de silence radio, il fallait que je trouve un moyen de lui parler sans débarquer chez lui à l’improviste, au risque de tomber sur quelque chose qui ne m’aurait pas plu.

    Je me laisse aller dans mon canapé et change de chaine pour une série TV policière.

     

    — Tu m’évites, je déclare, t’es venu bosser à des heures indues avec Ciera pour ne faire que des solos.

     

    Quand j’ai demandé à Scarlett ce qu’il foutait, elle s’est contentée de me répondre que Dereck prenait quelques jours de recul dans notre partenariat mais continuerait de tourner seul pour faire quelques vidéos en stock. J’étais furieux parce que je savais que ces raisons étaient dues au week-end à Chicago et à ce que je n’aurai pas dû voir.

     

    — Jax…

     

    — Tu me manques Dereck, j’avoue sans hésitation.

     

    Je sens de l’électricité statique dans l’air. Bordel, même à travers un putain de téléphone, l’excitation arrive à me gagner. Et je regrette d’avoir cette conversation ainsi.

     

    — Ne me dis pas ça., souffle mon partenaire d’une voix crispée.

     

    — C’est la vérité.

     

    Dereck ne dit rien et je comprends qu’il n’est vraiment pas bien. Et pour une fois, c’est à moi de ne pas être le plus paumé de nous deux. Il a besoin de quelqu’un de costaud et de franc pour le secouer.

    Et je veux être cette personne.

     

    — Écoute, je ne te laisserai pas.

     

    — J’ai eu besoin de prendre du recul.

     

    — Je ne t’en veux pas. Mais j’aimerais que tu reviennes. Ça fait une semaine Dereck.

     

    Je m’attends à un « et alors ? » mais rien de tout ça n’arrive.

     

    — Pourquoi ? me demande Dereck.

     

    Je frotte mes joues râpeuses, est-ce que l’ancien Hardeur en profite pour me sortir les vers du nez ? Sans doute, et je crois que ça me plait qu’il ait besoin d’un pas vers lui me concernant.

     

    — Parce qu’il est toujours question d’essayer. Et là-dedans, il y a toi me parlant. Écoute… ça m’a fait terriblement mal, Dereck, de te voir dans cet état. Parce que je ne savais pas quoi faire. Et dans ce mal, j’ai compris une chose : je tiens à toi. Je ne veux pas que tu sois seul avec tes problèmes. Tu es mon ami et tu es plus que ça même. Ce n’est pas une question de fort ou de faible, de courage ou de pitié. J’ai peur Dereck, peur de ce qu’il va se passer. Peur de ne pas être à la hauteur et de te faire du mal parce que je ne suis comme aucun des hommes que tu as connus. Et en même temps, j’ai peur de te laisser filer et de comprendre par la suite que je t’ai manqué. J’ai réfléchi Dereck, et je veux essayer. Parce que ces trois jours à Chicago m’ont fait comprendre une certaine réalité. Parce que ce que j’ai ressenti en étant avec toi, je pensais ne plus jamais le ressentir et d’une certaine façon, je n’ai jamais vécu ce que j’ai eu à tes côtés. L’abandon, la confiance, le lâché prise…

     

    Je ferme les yeux en sentant l’adrénaline me gagner alors qu’un mot me brûle la langue. Je sens Dereck suspendu à mes lèvres.

     

    — L’attirance et ce mot qui m’effraie autant, je poursuis.

     

    L’amour. J’ai vécu de nouveau ce sentiment bouleversant qui noue les entrailles, provoque le cœur, bloque la respiration et nous fait planer.

    J’inspire en essayant de trouver les mots les plus adéquats pour lui dire que je veux qu’il soit là. Maintenant.

     

    — Reviens, et essayons, je tente. Je ne connais pas tout de ton passé et j’ai beaucoup de questions, mais je présume que dans une histoire, même si on se doit de garder un jardin secret, parler à l’autre fait partie de l’intimité. OK, tu as besoin de temps suite à ce qu’il s’est passé à Chicago avec ton ancien partenaire,  sache que tu n’as pas à le faire seul. Je suis là, je comprends et je veux comprendre ce que tu ne me dis pas. Parce que je pense que tu as besoin d’en parler. J’ai bien compris que ta fierté masculine en avait pris un sale coup, parce que j’ai la même. Tu n’as pas supporté que j’assiste à ta… descente en enfer.

     

    — Jax, arrête, finit-il par m’interrompre après mon long monologue.

     

    Bingo ! J’ai touché le fond du problème.

     

    — Pourquoi Dereck ? Je comprends, j’ai compris le mal que ça t’a fait de croire que tes efforts pour sortir de la drogue et la peur de devoir tout recommencer. Ça ne fait pas de toi un faible, bien au contraire bordel. C’est les géants qui chutent et se relèvent qui sont les plus forts. Même si ça ne voit pas, j’ai compris que ta lutte était quotidienne, parce que tu ne laisses jamais rien paraitre en public. Mais ne t’isole pas parce que MOI, je t’ai vu dans cet état. Je veux te prouver que tu peux être ainsi avec moi… comme je pourrais l’être si nos rôles étaient inversés.

     

    Silence. Mon cœur se met à battre à tout rompre, j’attends une réaction et je trouve que mes propos ont été à la hauteur de ce que je voulais. Ça fait une semaine que j’y pense il faut dire.

     

    — Dereck ? je tente.

     

    Un soupir amusé résonne à mes oreilles.

     

    — Tu as foutrement raison.

     

    Dieu merci !

     

    — C’est comment d’avoir tort ? je le taquine en sentant mon rythme cardiaque s’affoler davantage.

     

    — Douloureux pour ma fierté.

     

    — Viens chez moi et je tâcherai de la soigner.

     

    Je me tais en fermant les yeux devant ma proposition des plus osées. Merde, j’essaie vraiment.

     

    — On n’est pas obligé de parler… dans un premier temps.

     

    Dereck se met à rire et je l’imagine chez lui, en train de sourire à mes tentatives foireuses de le convaincre. Je sais qu’il n’est pas bien, je veux y remédier.

     

    — Tu me proposes un plan baise sur ton canapé avec ta fille à côté ?

     

    — Qui a dit qu’on allait baiser sur mon canapé ? Sage est chez une de ses copines.

     

    — Et tu as réussi à donner ta fille pour la soirée à quelqu’un ?

     

    Un point pour lui également.

     

    — J’essaie Dereck, je réponds sans honte.

     

    — Je le vois… Jax ?

     

    — Oui ?

     

    — Je maintiens que je ne mérite pas ce qu’il se passe.

     

    Conneries !

     

    — Et moi, je reprends avec conviction, je t’affirme que le plus malchanceux de nous deux c’est toi. Parce que si tu crois qu’un ancien camé ne me mérite pas, je suis certain qu’un homme comme toi ne mérite pas d’avoir quelqu’un qui est flippé à l’idée de laisser entrer quelqu’un dans sa vie. Pourtant, je veux que tu saches que c’est l’homme qui m’a plaqué contre un mur d’ascenseur et baisé comme un fou dans une chambre d’hôtel que je veux. Je veux l’homme avec qui je ris et avec qui je m’entends bien. Je veux ça… mais je veux aussi celui qui s’autoriserait à être faible. Je veux essayer.

     

    J’entends Dereck jurer de l’autre côté du téléphone, et au fur et à mesure que je me refais mes propos, je sens naitre une putain d’érection dans mon jean.

    Bordel, quand est-ce que les choses ont changé à ce point pour qu’un homme me mette dans un tel état ? Parce que c’est Dereck, c’est lui, tout simplement.

     

    — J’arrive dans dix minutes, me répond Dereck en me sortant de mes pensées.

     

    — Tu ne me dis pas ça pour me faire taire et te débarrasser de moi ? je demande, inquiet.

     

    — Si.

     

    Je souris, mais je ne suis pas certain que ce soit complètement faux.

     

    — Je déconne Jax, mais je ne veux pas avoir la suite de cette conversation au téléphone.

     

    — Dépêche-toi d’arriver alors.

     

    Pour qu’on puisse se voir, discuter et sans doute même plus que ça.

    Dereck ne dit rien, il raccroche et je reste un instant suspendu à ce silence. Mon cœur se met à battre de plus en plus vite alors que je l’imagine quitter son appartement pour me rejoindre.

    J’ai quinze ans à cet instant, pas vingt-six. Je ressens la même chose qu’à mon adolescence et ça fait du bien.

    Je suis nerveux, mais j’ai hâte, l’impatience me noue l’estomac et je me demande ce que notre future conversation va donner. J’ai beaucoup pensé aux propos de Demon et j’espère que Dereck va avoir suffisamment confiance en moi pour m’en parler, même si c’est affreux, je veux l’aider.

    Et bordel, je ne tiens pas en place.

    Vingt minutes plus tard, la sonnette de mon appartement résonne. Je me lève comme un fou, et gagne l’entrée de l’appartement pour ouvrir. Je tourne les clés dans la serrure le cœur au bord du gouffre.

     

    — Mec, tu t’es perdu en chemin… je déclare en ouvrant la porte.

     

    Je me fige net en découvrant la personne qui me fait face. Mon cœur s’arrête de battre, un frisson me gagne sous le choc et une voix que je pensais oublier, résonne dans le couloir.

     

    — Salut Jaxson.

     

    Je n’arrive pas à répondre ni à dire quoi que ce soit. Je n’arrive pas à y croire.

    Ce n’est pas Dereck qui se trouve devant moi. C’est un fantôme du passé, un que je ne pensais ne plus jamais revoir.

    C’est elle. Elle est là.

    C’est Bell.

     

    AMHELIIE