Criminals Red, Epilogue
Épilogue
***
J’arrive devant une porte rouge décorée par une guirlande de Noel, les murs sont blancs, il y a même un petit perron et un tapis extérieur avec écrit « WELCOME ». Un cliché à l’état pur, mais venant de ma partenaire, plus rien ne me surprendra. Henderson m’a dit que Tempérance avait déménagé dans un quartier chic, dans une petite maison, où son père était certain qu’elle serait en sécurité. Fini l’appartement dans l’immeuble ultra branché, place à la simplicité. Et j’aime ça.
Je souris en examinant les lieux, New York dans un mois de décembre, la neige qui tombe et les sols qui commencent à se recouvrir d’une fine couche de blanc. La ville est magnifique à cette période des fêtes. Je regrette presque d’avoir été mis sur la touche, et d’avoir manqué ce spectacle divertissant. Times Square avec son grand sapin, c’est quelque chose à voir.
Il doit être près de 22 heures, il fait un froid de canard à l’extérieur, je n’ai pas pris la peine de la prévenir, je débarque à l’improviste, comme elle l’a fait dans ma vie. À vrai dire, je me voyais mal l’appeler. Je voulais la voir en vrai, entendre sa voix en direct et pouvoir la serrer dans mes bras à l’instant où je la verrais.
J’ai tant de choses à dire, tant de choses à me faire pardonner. Comme d’avoir agi en idiot lors de notre opération.
J’inspire l’air froid, ma main libre vient appuyer sur la sonnette. Je m’attends à être accueillis avec un revolver, et j’espère que la surprise de fera pas commettre d’imprudent à ma partenaire. Je pense m’être pris mon quota de balle pour les dix ans à venir.
J’entends des pas derrière la porte, puis le son familier du loquet, suivis de très près des clés remuant dans la serrure et le grincement de la porte.
Un corps qui m’est plus que familier apparait sous mes yeux. Tempérance est en pyjama d’hiver à gros lapin, des chaussons en fourrure et un long gilet gris. Elle a sur le nez ses lunettes d’intello et ses cheveux blonds sont relevés dans un vulgaire chignon.
Je lis le choc sur son visage, et malgré sa tenue très peu valorisante, je la trouve magnifique après deux mois d’absence.
— Salut… je lance avec un maigre sourire.
Sans réfléchir, et sans même prêter attention à mon bras encore abimer, Tempérance vient se jeter contre moi, ses bras viennent entourer mon cou, et sa bouche s’écrase sans douceur contre la mienne. Je me laisse gagner par ce sentiment merveilleux qui me réchauffe la poitrine, et me confirme qu’effectivement, elle m’a beaucoup manquée et que non, je ne vais pas commettre l’erreur de ma vie en lui dévoilant enfin ce que j’ai sur le cœur.
Je réponds à son baiser avec douceur, savourant le goût chocolaté de ses lèvres.
Perdu dans cet amas de sensations, je ne vois pas arriver la claque douloureuse sur ma joue. Mais je ne suis pas surpris. Je pense que j’ai mérité largement plus, et que je vais avoir le savon du siècle… sauf que Tempe s’écarte de moi en soupirant, puis sa main revient prêt de l’endroit où ses doigts doivent avoir fait une marque. Elle me caresse la joue dans un geste tendre qui fait faire des bons à mon cœur. Tempérance me demande rapidement comment je vais, je réponds vaguement, parce que ça va, je vais bien à présent.
Avant qu’elle ne puisse dire quoi que ce soit d’autre, qui m’empêcherait de me délier la langue. Je me lance, dans ce marathon, ces questions qu’elle se pose depuis le début et qu’elle est en droit de savoir si elle veut encore de moi.
— Redmund, je murmure doucement, comme si je venais de dire un secret.
Tempérance fronce les sourcils, ne comprenant pas pourquoi je dis ça. Je souris, je sens que le mythe ne va pas tarder à tomber, mais qu’importe.
— Mon prénom c’est Redmund. C’est celui que ma mère m’a donné lorsqu’elle m’a mise au monde. Redmund Gallagher Calvagh. C’est comme ça que je m’appelle, je renchéris en prenant soin de ne pas quitter son regard gris.
Ma partenaire se met à sourire à son tour, un franc sourire vient à égayer son visage si merveilleux. Je pense qu’elle se retient de rire. Elle pourrait, c’est immonde. J’aurais pu m’appeler Tuck, Archibald, ou même Fitz, mais Redmund…
— C’est… horrible. Red te convient mieux, chuchote-t-elle en se mordant la langue.
Je ris à sa place, en espérant qu’elle fasse de même.
— Tu l’aurais trouvé ? je l’interroge, amusé.
Tempérance secoue la tête, sa main vient se poser sur mon épaule encore blessée.
— Un jour, mais je pensais à moins… moche en priorité.
— Raté, je lance dans un souffle.
Nous nous dévisageons tous les deux. Je sens une tension remplie de questions, de sous entendus. La femme qui se tient devant moi se demande à quoi s’attendre en ma présence, et je la comprends, moi aussi, je me poserais des tas d’interrogations. Surtout que d’après les échos du bureau, elle n’a pas apprécié d’avoir été mise à l’écart et de ne pas avoir pu m’approcher après l’opération qui m’a sauvé la vie.
Foutue miss Amérique au caractère de merde.
— J’ai beaucoup de choses à te dire Tempe, je lui confie d’une voix étrangement calme, donne-moi juste le temps nécessaire pour t’offrir ce qui me reste de secrets. Laisse-moi te donner ce que je n’ai jamais donné à personne.
Ma partenaire ne me dit rien, elle se contente d’hocher la tête, comme si un mot de sa part me ferait revenir en arrière.
Sauf qu’il est temps d’avancer.
Je passe une main nerveuse dans mes cheveux noirs, soudain envahis par le traque, mais ne reculant pas.
— J’ai été élevé dans un foyer de l’état. Je n’ai pas de famille, pas beaucoup d’amis, je suis un solitaire, aimant son pays. Un mec de 37 ans, qui n’a jamais cherché à se caser. J’ai beaucoup de défauts, j’en aurais encore. Et j’espère que la vision que tu as de moi ne va pas changer lorsque tu apprendras qui je suis, et ce que j’ai pu faire.
Je déglutis avec difficulté, en prenant soin de ne pas rompre le contact avec Tempérance. C’est comme si son regard encore rempli d’ignorance, me donner la force.
— J’ai reçu plusieurs médailles, je bafouille un peu, la Purple Heart, la médaille d’Honneur, la Silver Star, mais je ne les méritais pas. Tout le monde m’a pris pour un héros pour ma carrière, pour l’acte soi-disant héroïque que j’ai fait, mais je n’en suis pas un. À mes yeux, je suis le type qui aurait dû sauver ces frères. Ma seule famille était ces mecs-là. Ils étaient les seuls, ceux que je n’avais jamais eux. De vrais frères.
Je ferme les yeux un instant, juste une fraction de seconde pour chasser les images violentes qui assaillissent mon esprit. Non, je ne suis plus choqué, je l’ai été, mais plus maintenant, je me suis conditionné pour ne plus l’être.
J’inspire et reprends mon récit, mes yeux bleus dans le gris de ceux de Tempe.
— À 20 ans, j’ai intégré la TEAM 6 chez les SEALS. J’étais en Virginie, c’était là-bas ma maison. Mon équipe était spécialisée dans la section renseignement en véhicules. En huit ans, j’ai obtenu plusieurs compétences : le tir de précision, éclaireur/navigateur, interrogateur, exploitation des sites sensibles, et spécialisation dans les opérations spéciales avancées. J’étais un leader, un soldat talentueux, avec un brillant avenir au sein de l’armée. J’avais tout pour moi. Tout pour faire une grande carrière. Il y a eu beaucoup de missions extrêmement dangereuses, surtout après les attentats de 2001, la guerre en Irak, celle en Afghanistan. Je n’étais qu’un petit con de 28 ans qui aimait l’adrénaline, qui ne ressentait pas la peur, un fou. Et il y a eu cette fameuse mission, Opération Liberty Red.
Ce nom fait frissonner ma partenaire, je sais qu’elle a entendu une partie de ma conversation avec notre tueur. Je sais qu’elle sait qu’il s’est passé des choses ce jour-là. Mais Tempe ne m’interromps pas, elle se contente de poser une main chaleureuse sur mon bras blesser, m’invitant à poursuivre.
— J’étais en Afghanistan depuis trois mois, j’allais rentrer en permission, nous allions tous rentrer en permission. Tu sais, comme dans les films, on s’était royalement fait chier durant notre mission. Et lorsque l’Opération Liberty Red est arrivée, on était plutôt ravis de se bouger enfin le cul. On nous avait envoyé pour arrêter un gros bras d’une section terroriste qui était soupçonné de préparer un attentat sur un convoi de militaires blesser. J’avais interrogé un informateur, la veille et tout sembler être routinier…
Mais tout à basculer.
— Quand nous sommes arrivés sur les lieux, un des types de mon équipe trouver le quartier étrangement calme. Il voulait qu’on sécurise les lieux avant d’entrer dans le bâtiment. Je ne voulais pas, j’étais certains que ça ferait foirer l’opération. Alors, on a pris la décision avec notre chef d’entrer. Et puis on a réalisé bien assez vite qu’on nous avait vendu avant qu’on arrive, et ils avaient pigé les lieux. Nous sommes tombés dans un piège, ils étaient de partout. Nous n’étions qu’une dizaine, et nous sommes tombés, un à un. J’ai vu toute ma famille, mourir sous mes yeux, tués par les mains de dingues. J’avais connu des affrontements terribles, mais pas à ce point. Pas aussi violent.
Je revois encore le regard agonisant de certains de mes camarades, et ce choc dans les yeux alors qu’ils ne comprenaient pas ce qui leur arrivé.
Je serre la main de Tempe en poursuivant.
— J’ai été blessé lors de cette fusillade, d’où mes cicatrices. Je savais qu’on allait mourir et je savais que je ne voulais pas mourir. Il ne restait que moi, mon coéquipier blessé, et notre chef. Ce dernier s’est sacrifié pour nous laisser filer. Avant qu’ils ne partent à notre poursuite, Sam Langston, un des mecs qui était encore en vie, un petit nouveau, un spécialiste en explosive, a repéré près de l’entré, la bombe qu’ils comptaient faire exploser. Il m’a montré comment l’activer. Je l’ai activé, et je l’ai trainé à l’extérieur, sur plusieurs pâtés de maisons, en étant blessé, la peur au ventre que l’explosion du bâtiment n’est servie à rien. Je nous ai mis en sécurité et j’ai attendu toute la nuit que les équipes de renfort arrivent. Je n’ai jamais prié de ma vie mis à part cette nuit là, pour vivre et pour que mon partenaire, ce gamin qui se vider de son sang dans mes bras puisse s’en sortir. Toute la nuit j’ai entendu des rafales de balles à l’extérieur, ils nous cherchaient et je priais pour que cet enfer se termine vite. On venait de perdre notre team entier, et personne ne semblait espérer que nous nous en étions sorties.
Je me tais quelques instants en voyant le geste discret de Tempérance, elle essaie de me cacher les quelques larmes traitresses, mais elle ne doit pas le faire. Moi aussi j’aurais aimé pleurer en écoutant cette histoire, en espérant que ça ne soit pas la mienne.
— Les secours sont arrivés, tôt le matin, je reprends à voix basse, après avoir fouillé une partie du grand quartier. Mon partenaire était si mal, je réfléchissais déjà à comment faire pour nous sortir de là, comment passer inaperçu en pleine journée en étant blessé et en ayant sa tête mise à pris. Mais ils sont arrivés. J’avais sauvé Sam Langston, foiré une opération, perdu toute mon équipe et j’étais un héros aux yeux des autres. Alors que les véritables héros sont morts dans ce bâtiment, sous mes ordres et de ceux de notre chef. L’Armée m’a renvoyé six mois plus tard en mission, où j’ai littéralement pété un câble en intervention, et ça ne s’est pas arrangé quand j’ai appris que Sam était mort des suites de ces blessures. Alors on m’a rapatrié, on m’a soumis à des tests psychologiques, un médecin a décrété que je souffrais d’un syndrome post-traumatique et que je n’étais plus apte à pouvoir enfiler un uniforme. J’avais deux choix qui s’offraient à moi. La retraite, et je devenais fou, ou l’exploitation de mes capacités sur le terrain, le fait que je parle couramment arabe et mes connaissances du milieu du terrorisme étaient des atouts. L’Armée a passé un accord avec le FBI qui cherchait un type pour un boulot d’Agent dans le Département de l’Antiterrorisme. C’était ce que je faisais avant d’atterrir ici. Je bossais chez les terroristes. Ils ont passé un accord, je retournais au civil, mais si jamais on avait besoin de moi, je devais reprendre l’uniforme. J’ai passé les huit dernières années à New York pour oublier grâce à mon travail ce qui s’était passé. Je n’étais pas un cadeau lorsque j’ai débarqué au bureau, mais heureusement pour moi, j’avais Blaine, mon ancien partenaire, qui a su canaliser le gosse que j’étais.
Blaine m’a sauvé de mon enfer, et toute ma vie, je lui en serais reconnaissant. C’est un père à mes yeux, un père qui m’a presque giflé à la sortie de mon coma parce qu’il était en colère et effrayé. C’est là que j’ai réalisé, que j’avais une famille, des gens qui m’aimaient et qui m’attendaient.
Je souris en tendant mon pouce pour essuyer la larme qui glisse sur sa joue. Je me livre à cœur ouvert ce soir, sans condition, juste la vérité.
— C’est ça ma vie, je renchéris. Il n’y a rien d’extraordinaire à mon sujet. Je suis simplement un homme qui a souffert, un homme qui tente de vivre avec son passé tous les jours. Et je suis l’homme qui est tombé éperdument amoureux de sa partenaire, mais qui n’était pas assez courageux pour l’admettre et lui avouer.
Mes derniers mots font apparaitre une lueur de surprise et de joie dans le regard gris de ma partenaire.
— Mon film préféré ce n’est pas Star Wars, c’est Forest Gump, parce que j’aime la morale de ce film et que je l’ai découvert avec mes équipiers en plein désert sur une casette. Je pleure devant La Liste de Schindler parce que je trouve que c’est le film le plus bouleversant que j’ai vu. Matrix m’énerve avec ses ralentis, et je me marre devant Titanic tellement je le trouve puéril, et je n’arrive pas à ne pas bander devant Pretty Woman, ce sont les vraies réponses que tu attendais au début de notre partenariat sur mes goûts cinématographique. Concernant mes habitudes, j’aime rentré chez moi et écouter de l’Opéra ou de la Musique classique parce que ça me fait oublier la journée de merde que j’ai eue, et ça me permet de m’endormir sans rêver des horreurs que j’ai faites et vu lorsque j’étais envoyé à l’autre bout de la planète. Je fais des cauchemars Tempe, mais mon esprit s’est tellement habitué à ces images qu’ils ne me réveillent plus. J’adore Kurt Cobain, et j’ai déprimé pendant des semaines quand il est mort. J’aime le vrai rock et pas la merde que tu écoutes. Je ne lis pas playboy, je n’ai pas besoin de magazine pour me branler, mais j’aime le Petit Prince parce que lorsque j’étais gosse et que j’étais seul en foyer c’était mon seul réconfort. Je déteste les séries TV policière ça inspire les criminels, mais bizarrement j’aime les regarder avec toi. J’aime le basket et je pense que le football est un sport de tapette, je n’aime pas l’été, j’aime trainer au lit le dimanche et aller courir au lever du soleil dans Central Park. Je ne sais pas ce qu’est une famille et je suis un gros salop parfois. Et puis…
Je me rapproche un peu plus de Tempérance, pour sentir la chaleur de son corps et obtenir cette proximité et ce plaisir de l’avoir contre moi.
— … Je crois que je suis tombé amoureux d’une petite blonde qui m’a fait bandé au premier regard et qui vient tout droit de Chicago, qui aime le RNB et ses nouveaux groupes de rock à la con, qui lit des livres étranges en psychologie et qui aime mater Esprit Criminels et Les Experts Manhattan en mangeant chinois, merde je déteste la bouffe chinoise… et pourtant tu es là, et j’ai trente-sept ans et je suis tombé amoureux d’une femme plus jeune que moi qui a toute la vie devant elle et qui ne devrait pas se coller le cas que je suis. Et quand je te vois, Tempérance, quand je te vois, je me dis que la vie vaut le coup d’être vécu, je me dis que tu es peut être venu ici pour moi. Que le destin, t’as mise sur ma route pour me prouver qu’il était temps d’avancer, temps d’arrêter d’être en colère, temps de cesser de m’en vouloir, temps de me pardonner. Qu’il était temps que je vive, et que je fasse vivre les quelques rêves secrets que j’ai tenté d’oublier depuis des années.
J’éclate de rire, mais rien n’est drôle, je suis juste nerveux. Et je me rends compte que c’est la pire déclaration d’amour qu’on peut faire à une femme.
— En fait, je pourrais simplement te dire que je t’aime, ce serait plus court et plus simple à comprendre alors…
Je me prends un air sérieux et livre les derniers secrets de mon âme, à cette femme qui m’a fait chavirer le cœur.
— Je t’aime Tempérance Silver. Et je n’ai pas envie de te laisser t’en aller, je murmure avec sincérité.
Un silence pesant s’installe entre nous, sa main reste dans la mienne, qu’elle serre avec force. J’ai peur de sa réponse, peur de l’entendre dire des choses qui me feraient regretter de m’être ouvert à elle. Alors, comme le bon vieux amateur en amour que je suis, je brise ce moment intense et romantique en parlant… du boulot.
— J’ai appris que tu avais reçu trois propositions suite à l’affaire. Félicitation.
Tempérance hoche la tête en séchant ces larmes. Surprise, et ne voulant pas paraitre émue parce que je viens de lui dire. Mais je vois bien qu’elle est au bord de la rupture.
— Je sais que tu en as eu une aussi. Félicitation Red. Washington, tu vas adorer.
Sa voix est rauque, et elle fuit mon regard.
— Bébé… je… je tente de dire, mais mon temps de paroles semble terminé.
Tempérance s’écarte de moi, et marche vers la commode de l’entrée, où trône trois dossiers du bureau, les mêmes que j’ai en ma possession. Elle n’en prend qu’un seul, et me le tends.
J’attrape le dossier tant bien que mal. Mais mon esprit est concentré sur elle.
Ma partenaire de 25 ans semble toute chamboulée, ces yeux sont rouges, mais elle n’en perd pas pour autant son charme.
— C’est celle de Washington que j’ai choisi. Je ne veux pas de Chicago pour travailler chez les cols blancs, je ne veux pas de New York, pour rester dans la crime. Je veux Washington. Parce qu’à Washington, je pourrais être avec toi. Washington, c’est toi.
Elle ouvre le dossier et me montre la feuille de poste. J’y jette un rapide coup d’œil, ne voyant pas où elle veut en venir.
— C’est une demande de transfert pour un partenariat. Ils nous transfèrent tous les deux à Washington, dans le département de l’antiterrorisme. Si je dis oui, rien ne changera, si ce n’est notre environnement. Je n’y connais absolument rien là dedans, je n’ai que mes capacités en psychologie. Je vais avoir besoin d’un instructeur encore. Je vais avoir besoin de toi Red… Promets-moi seulement de toujours porter un gilet par balle à partir de maintenant.
Le choc.
Je crois que je suis choqué, et surpris de ce que j’entends. Je ne m’y attendais pas. Et un élan d’espoir de pouvoir faire vivre notre histoire me gagne.
— Tu veux vraiment accepter Washington ? je lui demande dans un chuchotement.
Tempérance est plus que sérieuse, même si ses mains tremblent.
— Je veux vraiment accepter Washington. Je veux être avec toi Red, et c’est une belle proposition pour ma carrière cette place. Même si on devra vivre caché quelque temps, ce n’est pas grave. Parce que je t’aime Redmund Calvagh. Je suis tombée amoureuse de toi alors que j’aurais dû te détester jusqu’au bout. Je t’aime et je me fiche que tu sois un héros ou non, un gros con ou pas, que tu es douze ans de plus que moi. Je t’aime et c’est tout ce qui compte. Alors prend moi dans tes bras maintenant, embrasse moi, dis-moi que tu vas bien et rentrons, je meurs de froid et j’ai envie que tu me fasses l’amour jusqu’au petit matin.
Je fais le dernier pas qui me sépare de ma coéquipière, mon bras qui n’est pas blessé passe autour de sa taille, d’un geste sec, je l’attire contre moi, son petit corps retrouvant sa place initiale. Ses mots résonnent en moi comme les derniers éléments pour guérir ce qu’il y avait de briser en moi. Elle m’aime, et jamais je n’aurais pensé que ce soit le cas. Et pourtant, elle vient de me le dire.
— Redis-le-moi.
— Je t’aime… à ton tour !
Je souris comme un idiot.
— Bordel, moi aussi je t’aime, et ça m’avait manqué, je murmure en glissant mon nez dans ces cheveux.
— Tu m’as manqué, me corriges Tempe en resserrant sa prise autour de moi.
— Partons pour d’autres aventures à Washington alors, Miss Amérique.
Tempérance me sourit, elle se dresse sur la pointe de ses pieds, et vient planter ses lèvres sur les miennes dans un dur baiser. Je retrouve enfin la chaleur enivrante de ma partenaire. Sa proximité, et ce battement fou au creux de ma poitrine qui me confirment bien que tout ceci est réel. Je suis heureux, en vie, amoureux et c’est tout ce qui compte.
Je la pousse vers l’intérieur de son appartement, et referme la porte, le sourire aux lèvres, en laissant derrière moi, le poids d’un lourd passé sur mes épaules, avec l’espérance d’un avenir meilleur.
Je m’appelle Red Calvagh, je suis agent du FBI depuis quelques années… au cours des six derniers mois de l’année 2013, j’ai appris qu’il ne fallait pas rester sur ces acquis, que le passé doit rester au passé, qu’il ne fallait pas tourner le dos à l’avenir. J’ai une carrière qui aura encore quelques belles avant devant elle. J’ai des projets, beaucoup de projets. Mais surtout, je suis tombé amoureux d’une femme exceptionnelle. Tempérance est une femme belle, intelligente, énergique, talentueuse et volontaire. Sa vision de la vie et des gens est presque en totale opposition avec la mienne, mais je m’en contre fou, je sais qu’elle me fera ouvrir des portes et qu’à ces côtés, je ne craindrais pas de changer.
FIN
Amheliie