Dawn & Wolfgang
CHAPITRE 14
Révélations
***
Dawn
Un sentiment étrange me sort du sommeil. J’ai l’impression qu’une décennie vient de s’écouler, mon corps meurtri par l’effort me fait mal… et me fait un déclic de ce qui s’est produit la veille. Wolf.
Je me fige, lorsque tout me revient à l’esprit, il est venu hier soir, il m’a tout…avoué, l’article, la raison de son départ, ce triste et terrible secret qui l’a éloigné d’une vie paisible pendant douze ans, et notre nuit.
Un peu hésitante, je tends la main à l’autre du bout du lit pour voir s’il est toujours là ou pas. Un profond sentiment de désespoir m’envahit en constatant que c’était trop beau pour être vrai. Wolf est parti.
Je me redresse, sort du lit, je ressens une gêne entre les cuisses, signe de trop d’effort en peu de temps. Mais… bon sang ! Comment regretter ? Faire l’amour avec Wolf c’est toujours aussi… possessif. C’est enivrant.
Le cœur serrer, et prête à trouver un mot dans ma cuisine, j’enfile un long t-shirt et sort de ma chambre, quand soudain, je pique un fard et rester stoïque face à ce que je vois.
Je regarde Wolf assit par terre, en train de jouer avec Beet le traitre. Il n’a pas bougé lorsque Wolf est entré dans l’appartement. Il n’a rien dit non plus face à cette présence masculine, les rares fois où j’ai ramené un homme chez moi, ça s’est toujours fini dans des situations très embarrassantes. Mais mon ancien meilleur ami… il semble avoir un don pour obtenir ce qu’il veut des autres.
– Salut, je lance pour lui faire part de ma présence.
Mon amant s’arrête de caresser la tête velue de mon chien, il se tourne vers moi la seconde d’après. Un sourire de séducteur au visage.
– Salut.
Il se relève, et mes yeux glissent le long de ce corps masculin et viril, bien taillé, et incroyablement excitant. Wolf est un homme bien monté… dans tous les sens du terme. Il a gardé sa carrure de sportif derrière son masque de PDG.
Mon amant s’approche de moi, et vient planter un dur baiser sur mes lèvres pour me saluer. Je n’y réponds pas, encore emprise par les vapes du sommeil et la surprise de le trouver encore chez moi.
– Tu as l’air surprise de me voir ce matin, constate Wolf en s’écartant.
– Je pensais que tu ne serais pas là, à vrai dire.
– Je n’ai pas l’intention de repartir. Je pensais que ce qui je t’avais dit hier, te l’aurais fait comprendre.
– À vrai dire non, je réponds.
Le regard bleu de Wolf me fait comprendre que ma réflexion ne lui plait pas, pourtant c’est vrai, je pensais en ayant vu qu’il n’était plus là qu’il avait pris ses jambes à son cou comme il s’est bien le faire.
– Eh ben, c’est dommage pour toi canard, je suis toujours la.
Nous nous regardons un moment, l’un et l’autre, dans un silence stressant, je ne sais pas quoi lui dire, et visiblement, lui non plus. Ce n’est pas les sujets d’explications qu’il nous manque, Wolf à douze ans à rattraper.
Mon impatience de journaliste me fait craquer avant lui.
– Qu’est-ce qu’on fait maintenant ?
Wolf hausse les épaules.
– Rien Duck. On ne fait rien d’autre que ce qu’on a fait… on laisse faire les choses entre toi et moi. Je pense qu’il vaut mieux…
Je l’interromps.
– Non, avec l’article.
Je remarque que le regard de mon ancien meilleur ami s’assombrit. Oui, ce n’est pas parce que tu m’as sauté toute la nuit que j’ai oublié.
– Tu comptes toujours le publier ? demande Wolfgang.
Je soupire, c’est compliqué.
– Je… je n’en sais rien. Wolf si je ne le fais pas, tu vas…
– Ne le fais pas, laisse-moi gérer mon merdier seul. Je n’ai pas à te demander que tu m’aides.
– J’ai été engagé pour.
– Oublie ton contrat, oublie ce que tu as signé. Il n’y a plus rien. Je veux seulement que tu sois hors de tout ça.
Wolf commence à s’énerver, je sens la tension se dégager de lui. Je comprends que tout ceci l’énerve, moi aussi, cette situation, je l’a trouve compliqué, et agaçante. Mais visiblement, autre chose inquiète mon amant, j’ai l’impression que les répercussions sont plus grandes que ce que je peux m’imaginer.
Je m’approche de lui, mes mains passent autour de sa taille, je le serre contre moi. Je sens Wolf se raidir, sans doute surpris de mon geste. Mais il ne me repousse pas pour autour. Je savoure la sensation de la chaleur qu’il dégage. C’est agréable.
– Wolf, c’est plus grave que je ne pense ? je demande contre son torse.
– Quoi ?
Je me redresse pour croiser son regard bleu.
– Tout… toute ta vie.
Wolf ferme les yeux, il soupire, et s’écarte de ma prise. Je pense avoir touché un point sensible.
Alors que je commence à croire qu’il ne va pas me répondre, il passe une main nerveuse dans ses cheveux, et comble le silence.
– Oui, c’est bien plus grave que tu ne le penses, je te mentirai en te disant que tout va bien. Si tout allait bien, jamais je ne serais venu chez toi.
– Ce sont ses rumeurs ?
– Oui.
Il est bref, il ne s’étale pas, et moi, j’aimerais de vraies réponses, j’aimerais comprendre.
Wolf s’éloigne à l’autre bout de la pièce, il part s’installer sur mon canapé, je le rejoins, il ne va pas échapper à cette conversation comme hier il l’a fait en se cachant entre mes cuisses. Mon amant lève les yeux sur moi lorsque je m’installe à ses côtés, ma main vient se perdre dans ses cheveux sombres lorsque je reprends la parole :
– Wolf, je t’en prie, parle-moi.
– Duck, je ne suis pas certain que tu vas aimer ce que je m’apprête à te dire.
Il soupire, et c’est étrange de voir un Wolfgang qui a l’air d’être excédé par la situation.
– Je n’aime jamais ce que tu me dis, je suis habitué à ce que tu me donnes des claques.
Enfin un sourire né sur son visage. Il vient poser ses mains sur mes cuisses nues.
– Il n’y a que ton cul que je n’ai pas encore claqué, et ça crois-moi, t’aimeras.
– Wolf ! Ne change pas de sujet !
– Très bien, fais-moi un café, et après je te dis ce que tu veux savoir.
J’hoche la tête, m’écarte de lui, et pars en direction de la cuisine, où je lance la machine à expresso. Je note qu’il a donné à manger à Beet.
Je reviens quelques minutes plus tard, armé de deux tasses noires, prêtes à affronter l’explication qu’il va me donner.
Wolf me remercie, je reviens m’installer comme avant. Ses yeux dévisagent les miens.
– OK, je t’écoute canard.
Je ne perds pas mon temps, je suis une journaliste, et entendre quelqu’un qui m’intrigue me dire « va y demande ce que tu veux, je te répondrais » c’est l’équivalent du 24 décembre pour un enfant.
– Ca consister en quoi ce que tu devais faire ?
Wolf me répond au tact au tact comme s’il avait déjà les réponses toutes prêtes.
– Je dois informer des nouveaux trafics et trafiquants qui tente de s’implanter à Miami.
– Comment tu peux savoir ça ?
– Avec mes associés, on parle beaucoup de nos affaires, je suis plutôt assez bien placé
– C’est vrai ce qu’on raconte alors ?
– C'est-à-dire ?
J’hésite, on n’a jamais parlé des autres rumeurs sur les Carpenter, celle qui parle de leurs « trafics ». J’inspire, et me lance, après tout, il a était franc jusqu’à présent.
– Que vous trafiquez l’argent, l’alcool via un marché noir, les putes, et j’en passe ?
Wolf se met à me sourire, je crois que ça l’amuse mes questions.
– C’est vrai, on gère tout ça.
– Tu tues des gens ?
Je me fige, et Wolf aussi. Je ne sais pas pourquoi cette question est sortie maintenant, je pensais lui demander plus tard, et pas de cette façon-là. Je regarde mon amant, soudainement nerveuse à l’idée d’entendre une réponse que je connais déjà.
J’oublie facilement qu’il n’est plus l’adolescent de dix-neuf ans.
– Oui.
Voilà une réponse qui fait mal.
– Est-ce que… tu aimes tuer des gens ?
– Non, je ne le fais pas de guetter de cœur. Je le fais quand je n’ai pas le choix.
– Combien de personnes tu as tuées en douze ans ?
– Une vingtaine je dirais.
– Des innocents ?
– Non, tous des coupables envers ce que je leur reprochais.
– Tu as tué ceux qui sont responsables de toutes ses rumeurs ?
– Oui, c’était des balances.
Je m’arrête dans mon élan en entendant sa réponse. Mon regard me trahit lorsqu’il se pose sur le sien. Je pense qu’accepter qu’il est du sang sur les mains, même du sang de tuant, ne va pas être facile à accepter. Une vie reste une vie.
– … je crois comprendre ce regard Duck, commence Wolf.
– Désolé… mais… tu es un informateur Wolf.
Mon amant soupire.
– Je n’ai pas le choix moi. Eh oui, c’est un peu salop de ma part de tuer des gens qui ont fait comme moi, mais si je le fais, c’est pour ma survie. Je ne suis pas dans un milieu simple et gai, Duck, mon monde, c’est l’argent, le pouvoir, le danger, l’illégalité cachait derrière des costumes Armani.
Ce serait moins amusant et excitant s’ils étaient tous à poil et en chaussette, le mythe des trafiquants tomberait à l’état de farce comique.
– Je vois… et tu penses faire ça pendant combien de temps ? Comment ça se fait qu’on ne t’as pas démasqué ? Je veux dire, si tu donnes des infos que peu de monde sait…
Les mains de Wolf montent et descendent sur mes jambes nues, plus qu’une caresse, on dirait qu’il tente avec son toucher de m’apaiser.
– Je suis, Wolfgang Carpenter, Duck, croit, moi, dans mon milieu, on me respecte, je suis crains, j’agace, j’énerve. Ce serait de la folie de m’accuser de quoi que soit moi, je perdrais trop, si on arrivait à remonter jusqu’à moi.
– Tu as quoi comme arrangement avec les flics ? Tu balances les nouveaux et en échanges…
– Ouais je fais ça « à peu près », et en échange, ils nous laissent mener notre petite vie, mais on ne doit pas faire trop de vagues, trop de « dégâts ».
– Et l’affaire de viol, plus ce dossier de détournement ça vous éclaire trop.
– Voilà.
– Pourquoi les FBI ne l’étouffe pas ?
– Ils n’ont pas eu le temps, fin, c’est une longue histoire, mais je suis sûr qu’à présent, ils ne peuvent rien faire, faut que ça se tasse tout seul.
Justement, elle ne se tasse pas, hier encore, au journal on en parlait. On ne parle que de ça alors que ce n’est qu’une enquête préliminaire. Il n’y a que des rumeurs, et quasiment pas de preuve ! C’est de la folie.
– Tu l’as violé cette femme ? je demande.
– Non Duck… (Wolf se met à sourire), mais oui, j’ai bien blanchi cet argent. Et non, ils n’ont plus rien vu que les témoins sont morts. Mais ça…
– Tu as l’air si sur de toi, en disant que ça va se tasser… ça fait plus de six semaines, et ça ne se tasse toujours pas… Mon article aurait pu calmer tout ça.
Le regard noir qu’il me lance veut tout dire, oui Wolf, on en revient à l’article !
– Je m’en sortirais sans ton article Duck, j’alignerais l’argent, je ferais ce qu’il faut.
– Pourquoi ne pas l’avoir fait avant ?
– Il fallait se renseigner, connaitre le dossier, les accusations, notre avocat n’a pas chaumé. Quand on a su qui c’était et ce que les flics avaient contre nous, c’est à dire quasiment rien, on avait plus qu’à agir.
Agir…
Mon cerveau me fait penser à quelques choses qui m’avait perturbé il y a quelques semaines, une situation qui m’avait intrigué.
– Quand je me suis retrouvé avec ton frère, c’est là que tu t’es occupé de…
– Oui.
– Oh…
Je me tais, j’étais loin de me douter à l’époque que c’était ce qu’il pouvait faire. Wolf avait réussi à tellement m’agacer que je ne pensais que par lui. Je ne voyais rien d’autre.
Il est doué.
– Pourquoi toi Wolf ? Et pas Ludwig, ou même Rob ? je demande, la tristesse dans la voix.
Wolf arrête de me caresser. Il m’attire un peu plus contre lui, et c’est la voix d’un homme blessé qui résonne à mes oreilles.
– Parce que j’étais le seul qui… avait à perdre. J’étais le seul qui n’était pas encore rentré dans ce monde, il ne m’avait pas pourri pour me faire devenir ce que je suis à présent. J’avais des rêves et des ambitions que j’ai dû abandonner. J’avais la rage, et le besoin de vengeance quand les flics ont exigé de moi de devenir une taupe. C’est tombé sur moi, voilà tout. Le petit dernier…
– Comment ont réagi ta famille en sachant ça ?
Wolf soupire, il a beau être un gros con, une histoire comme la sienne ne peut que le toucher, c’est loin d’être facile ce qu’il a vécu, ce qu’il fait et à du faire.
– Ma mère ne sait pas, mon père, mes frères, mon oncle, ils ont été paniqués, après tout, si je craque, si je demande d’arrêter, on risque d’aller tout droit en prison. Les flics savent s’arranger quand ils veulent. Et ma famille se repose sur moi. Ils savent que si demain j’envoie tout foutre en l’air, ça n’ira plus. C’est pour ça que je suis le Carpenter le plus pourris gâtés en affaire, mon père et mon oncle tente de se racheter en me donnant du pouvoir…
Il se tait quelques instants, je pense que me parler doit lui renvoyer à la figure toutes ses années et leurs conséquences. Mon cœur se serre de le voir si toucher. Voir Wolfgang humain m’émeut plus que je ne l’aurais cru.
– … j’aurais aimé avoir la liberté à la place, termine-t-il.
Je bouge sur le canapé, et viens m’asseoir sur ses genoux pour l’enlacer. J’ai un soudain instinct de protection qui m’envahit. Je pense même que s’il continue sur ce terrain, je vais me mettre à pleurer tant, ça me fait de la peine pour lui.
Bien sûr il reste Wolfgang Carpenter, LE CONNARD de première, mais un connard qui sait avoir un cœur de temps en temps.
Ses mains caressent mon dos pendant que je savoure le contact de ses bras autour de moi. J’embrasse son cou avant de demander :
– On fait quoi alors ?
– Pour nous cette fois-ci ?
Je me redresse pour lui faire face.
– Oui… je veux dire, cette nuit ne t’engage en rien. Je n’attends rien de toi Wolf.
Il me fait taire en posant un doigt sur ma bouche.
– Eh ben, c’est bien dommage. Parce que moi j’en attends des choses de toi.
– Wolf…
– C’est trop tard à mes yeux Duck, tu as reconnu que tu m’aimais et tu vois, cette fois-ci, je ne te laisserais pas passer. Je n’ai pas fait l’étalage de mes sentiments pour rien. Pour moi, tu m’es acquise. Alors, OK, je ne sais pas comment on va faire, j’ignore comment je vais me sortir de ce grand merdier, mais… si tu n’as qu’une chose à me dire.
– Laquelle ?
Wolf prend une grande inspiration, comme s’il voulait se donner du courage. Je note dans ses yeux toute la sincérité qu’on peut y mettre lorsqu’on veut parler de quelques choses de sérieux.
– Est-ce que tu veux être avec moi Duck ? Est-ce que tu veux partager ma vie ? Est-ce que cette nuit, pour toi, c’est le début d’une relation. Dis-moi ce que tu veux.
– J’en sais rien Wolf.
– Mais tu m’aimes ?
– Oui.
– Alors, tu serais prête à quoi pour moi ?
J’hésite, je pense que pour lui, j’aurais tout fait, je lui ai même donné ma virginité pour le contredire, j’ai volé dans un magasin, et j’ai même failli mettre ma carrière de journaliste en l’air pour lui.
– À mettre ma carrière en l’air comme j’ai failli le faire, je réponds.
– OK, moi je serais prêt à changer mes habitudes, enfin certaines. Et je dirais à ma famille qu’ils ont plutôt intérêt à me laisser tranquille.
– Pourquoi ?
– À ton avis ? Tu sais très bien que nos retrouvailles n’étaient pas dues à rien. D’une parce que tu es une grande journaliste, de deux, parce qu’on te connaissait qu’on t’a choisit. Les choses n’auraient pas dû se dérouler comme ça s’est déroulé. Je devais seulement te taquiner un peu pour te distraire de nos vrais problèmes…
Je l’interromps, il a une drôle de vision du « distraire », il m’a poussé à bout plutôt !
– Non, dis plutôt que tu devais faire le connard.
Mon amant lève les yeux au ciel comme si ce que je disais était stupide.
– Ouais bon OK, je devais faire le connard, tu devais simplement rédiger ton article, nous redorer le blason, et ressortir de nos vies. Seulement…
– T’es un gros connard qui ne s’est pas se contrôler.
Wolf sourit.
– C’est ça. Donc nous voilà, six semaines plus tard, et le constat est plutôt surprenant.
– C'est-à-dire ?
– Je n’aurais jamais cru débarquer chez toi, te dire toute la vérité, et… t’avoir avec moi.
– Moi non plus Wolf… mais… concernant nous deux…
– Je ne te demande pas en mariage. Je t’ai dit que je t’aimais et qu’à présent, j’ai compris, enfin du moins, je pense que petit à petit, t’avoir de nouveau dans ma vie m’a fait comprendre que je ne veux plus que tu en sortes. Même si ça va être dur, même si c’est le gros bordel, et que tu n’aimes rien de ce que je suis, j’espère que tu réussiras à passer outre. Parce que moi, j’ai beau être le plus grand des connards que tu connaisses, j’espère l’être un peu moins auprès de toi.
C’est ce qu’on appelle une déclaration, à la Roméo et Juliette version XXIème siècle sans aucun tact et avec des gros mots, autant dire, du Wolfgang tout craché. Ca m’amuse de voir à quel point, il ne s’est pas s’y prendre lorsqu’il a des sentiments.
– C’est à prendre ou à laisser, termine-t-il.
– J’ai besoin de temps pour cette question. Pour envisager quelques choses avec toi Wolf. Comprends-moi, c’est si soudain, jamais je n’aurais cru il y a deux jours qu’aujourd’hui, on en serait là. J’ai passé ses douze dernières années à te haïr pour être partie. Au fond de moi j’avais fait un trait sur un avenir en commun, ce n’est pas simple de se dire que tu reviens. (Ma main vient caresser sa joue râpeuse) Je dois me protéger, je n’ai pas envie de souffrir à nouveau alors… j’ai des sentiments Wolf, j’en ai toujours eu. Je crois que j’ai dû tomber amoureuse de toi quand je devais avoir dix ans. Seulement, depuis le temps, il s’est passé beaucoup de choses, tu es devenue quelqu’un de différent et il faut que j’avale tout ce que j’ai appris. Il faut que tu règles tes problèmes Wolf… j’aurais beaucoup de mal à vivre avec quelqu’un qui tue des gens.
– Je veux bien te laisser. Parce que je sais, qu’on ne peut pas prendre de décision sur un coup de tête, surtout celle où tu finirais ta vie avec un gros connard. Alors OK, prend le temps dont tu as besoin je vais faire en sorte de régler mes problèmes en t’attendant.
– Qu’est-ce que tu vas faire ?
– Je vais appeler mon avocat pour qu’il regarde le dossier des flics sur ma mission d’informateur. On va voir si on peut entamer des négociations.
– Ce qui veut dire…
Wolf m’interrompt en posant ses lèvres sur les miennes, ce qui me surprend.
– Bon, on a assez parlé de truc chiant pour la journée ! Maintenant…
Il m’attire sous lui, et vient faire peser son corps sur le mien. Je sens déjà contre mon ventre, une érection naissante. Sa bouche part taquiner mon cou.
– Maintenant, on va faire quelques choses de plus passionnant.
Je souris, je vois très bien où il veut en venir et ce ne serait pas pour me déplaire. Nous avons fini par boires nos deux cafés froids.
***
– Je ne peux pas m’absenter plus.
Oui déjà que tu devais t’en aller ce matin, tu es resté toute la journée à profiter de ma compagnie, de mon canapé, et du bonheur qui loge entre mes cuisses.
Je lui tends sa veste de costume, je ne vais pas le retenir.
– Je sais.
Wolf saisit sa veste, en me dévisageant d’un regard qui en dit long.
– Je sais pas ce qui m’est le plus dur, savoir que je m’en vais pour rentrer chez moi seul, ou savoir que je vais rentrer chez moi seul sans pouvoir jouir de ton corps toute la nuit. J’ai douze ans de baise à rattraper mine de rien…
Je ne le laisse pas finir, ma main vient le rappeler à l’ordre. Ca l’amuse de me mettre mal à l’aise, moi pas.
– J’ai une idée, renchérit Wolf.
– Elles sont rarement bonne Wolf tes idées. Souviens-toi que certaines de tes brillantes idées m’ont valu le pied dans le plâtre, ou bien le t-shirt troué, ou une arrestation au poste de police.
Et encore, la liste est bien trop longue pour lui résumer en deux minutes. Wolf décide d’ignorer ma remarque de toute façon, il ignore tout ce que je lui dis et qui ne lui plait pas. Là, je reconnais l’homme con. Mais bon… j’ai du mal à y résister maintenant.
– Dans une semaine, mon père va recevoir le prix de meilleur homme d’affaires de la ville…
Je l’interromps, hors de question !
– Je te sens venir.
Wolf me foudroie du regard, visiblement contrarié que je l’interrompe.
– Eh tu me laisses finir s’il te plait !
– C’est non Wolf !
Il secoue la tête en me souriant. Je n’aime pas ce regard, celui qu’il porte quand il sait que de toute façon, il obtiendra ce qu’il voudra. Comme toujours.
– Oh si tu vas dire oui ! Et d’abord tu ne peux pas me dire non, je ne t’ai pas encore posé la question ! Tais-toi et écoute.
– Je ne suis pas à tes ordres.
– Je suis sur que t’aimerais !
Nous sourions, chacun de nous deux a bien changé depuis la dernière fois, où nous nous sommes retrouvés aussi proche. J’ai autant de répondant que lui à présent. Je ne me laisse plus faire, et ça semble plaire à Wolf.
– Bref, je disais, est-ce que tu voudrais m’y accompagner ?
– Toi l’un des plus grands célibataires ? Accompagner ? Je ne suis pas sur que c’est bon pour ton image.
– Ouais, mais tant pis, au point où j’en suis.
Je redeviens sérieuse, sa demande me ferait plaisir, dans d’autres circonstances, surtout si elle avait été dans quelques semaines, mais maintenant…
– Ce n’est pas un peu… je commence.
Mais Wolf lui, a toujours la réponse à tout.
– C’est ce que je veux. Je ne t’ai pas demandé de m’épouser, je te demande d’être à mon bras lors d’une soirée, ce n’est pas un engagement pour la vie. Puis, je crois savoir que dans une relation, ou enfin ce qui ressemble à une relation, on doit sortir. Sors avec moi. Passons une bonne soirée.
– Et ta famille, tes problèmes ?
– Je gère, laisse-moi quelques jours, et on rira autour de la table tous ensemble.
– Ça m’a l’air trop beau Wolf.
J’ai l’impression parfois qu’il pense qu’il peut tout obtenir bien trop facilement. D’un côté, ça me confirme qu’il n’est plus mon ancien meilleur ami, mais bien un PDG puissant, et d’influence ce qui est loin d’être rassurant. Et de l’autre, je crains qu’il se brûle les ails à tout vouloir maintenant.
Mais qui dit non à Wolfgang Carpenter ?
– Accepte, renchérit Wolf, sur un ton qui ne me plait pas.
– Arrête avec ce ton autoritaire !
– Non parce que j’aime quand tu hausses le ton (il se penche vers mon oreille) il me fait bander… Dis-moi oui.
– Je vais y réfléchir.
Wolf soupire, sa main vient caresser ma joue pour m’embrasser chastement.
– Tu penses trop mon canard.
– C’est ta faute.
– C’est toujours de ma faute si on t’écoute.
– Mon dieu on n’est pas vraiment ensemble, mais tu m’emmerdes comme si ça faisait trente ans qu’on était marié. Wolf, on ne va jamais y arriver.
Wolf se met à rire, de bon cœur, j’aime les petites rides qu’il a autour des yeux quand il se laisse aller. Dire que j’ai passé ses dernières semaines à regarder le moindre défaut chez lui pour me dégouter au lieu de faire attention aux choses qui valent le coup d’être regarder.
– Ça fait vingt-neuf ans, mademoiselle Teal, que je suis dans ta vie, si au bout d’un quart de siècle j’arrive toujours à te faire ressentir quelques choses, même si c’est de l’agacement, pour moi, c’est important… Allez, accompagne-moi.
– Tu ne lâches jamais l’affaire !
– Jamais.
– Tu vas continuer d’être aussi chiant, agaçant, pénible, insupportable et con si jamais je te dis oui ?
– Je serais toujours, le gros connard, égocentrique, agaçant, chiant, à la limite de l’insupportable. On ne change pas l’eau en vin, tu ne pourras pas changer un Wolfgang Carpenter en un gentil et docile petit copain.
Je l’imagine un court instant, gentil, serviable, généreux, et humble et étrangement, je le trouve moins séduisant. C’est dingue, comme la gent féminine à un faible pour les mauvais garçons, surtout ceux qui possèdent une panoplie de défaut bien garnie.
Wolfgang se penche à nouveau, sa bouche s’écrase sur la mienne avec dureté. Je comprends qu’il va s’en aller après celui-là.
J’ai à peine le temps de savourer la sensation de ses lèvres sur moi, qu’il s’écarte.
– Je t’appelle Duck dans la semaine, pour te dire quand je viendrais te chercher samedi.
– Wolf !
– Ça te laisse quelques jours de réflexion pour choisie ta robe canard !
Il me lance un clin d’œil, en levant les mains en l’air en signe de défense, je me retiens de me mordre la lèvre en le voyant marcher en direction de l’ascenseur. Il a sa veste de costume sur l’épaule, sa chemise blanche sortie de son pantalon noir. Ses cheveux sont totalement en désordre, comme si une femme avait passé des heures à fouiller dedans.
Les portes de l’ascenseur s’ouvrent l’instant d’après, je le regarde entrer et me lancer un regard des plus brulants avant de disparaitre.
Je soupire en appuyant ma tête contre le rebord de la porte, jamais je n’aurais cru me réveiller ce matin et voir ma vie prendre ce tournant-là. Avec mon ancien meilleur ami, le retrouver et découvrir une autre facette du gros connard qu’il est d’habitude. J’ai découvert le Wolfgang qui aime, et qui protège les siens envers et conte tout, même lui.
Beet vient s’asseoir à mes pieds, il appuie sa tête contre ma main pour que je lui gratte, ce que je fais.
– Beet, je crois que Maman est dans la merde.
Mon chien secoue la tête, comme s’il m’avait compris. Ce salop n’a pas lâché Wolf de la journée. Comme s’il était ravi de retrouver un ancien ami… ou simplement un autre mâle dans cet appartement qui n’en voit presque pas.
Je suis encore plus paumé qu’avant, même si c’est génial ce que Wolf m’a dit, ce qu’il veut, j’ai dû mal à m’enlever de l’esprit ce qu’il m’a confié, son « secret ». Est-ce que j’arriverais à vivre avec tout ça ? Avec un Carpenter ?
À vrai dire je n’en sais rien.
J’aurais aimé avoir plus de temps de réflexion, mais la dure loi de la vie de tous les jours vient me rattraper quelques minutes plus tard, j’entends la sonnerie de mon téléphone portable, la spécial « c’est ton connard de rédacteur en chef, ne décroche pas ». À reculons, je ferme la porte, et part décrocher pour affronter cet autre individu insupportable, Dominic m’a pratiquement laissé tranquille ses dernières semaines, sans doute heureuses de ne plus m’avoir dans les pattes. Mais maintenant c’est différent, j’ai dit que je voulais écrire mon article chez moi, monsieur attend son sésame. Et je vais devoir expliquer, pourquoi, mon article ne sera jamais dans les kiosques à journaux.
***
Wolfgang
Je savais qu’elle dirait oui.
Je tente de regarder Duck d’un air détaché, mais ma satisfaction malsaine, me fais sourire comme un benêt. J’aime l’idée qu’elle vienne s’afficher à mon bras devant tout le gratin de Miami, devant mes proches surtout.
J’ai menti à Dawn, mais pour son bien. J’ai omis de lui dire que cette semaine à était un vrai calvaire pour moi, que le travail, c’est avéré bien plus complexe que je ne l’aurais cru.
Le lendemain de ma nuit chez Duck, j’ai réuni mon oncle, mon père, et mes frères ainsi que l’avocat pour une réunion, je leur ai dit ce que je comptais faire, et pourquoi Dawn ne leur avait pas répondu à propos de l’envoi de l’article. Je n’avais jamais assisté à une pareille querelle. Le clan Carpenter divisé, c’est du jamais vu.
Autant mon père, l’a plutôt bien pris lorsque j’ai dit que je voulais abandonner mon statue de taupe pour pouvoir mener une vie comme je l’entends. Il m’a simplement demandé si je voulais arrêter « nos affaires » à ceux quoi, j’ai répondu non. Je reste un Carpenter, j’aime ça, j’aime ce frisson d’illégalité, seulement, je sais que sur certains points, si je devrais me calmer.
Je n’ai pas eu à expliquer la raison du pourquoi je voulais tout arrêter et commencer les négociations avec le FBI, Rob m’a devancé. On en est même arrivé au point où on s’est jeté sur l’autre pour le massacrer. J’ai sans doute trahi le code des frères en allant me perdre entre les cuisses de Duck, mais vu le résultat, je ne regrette pas.
Mon frère a peur qu’on souffre, il pense que si je retire ma carte du jeu, tout s’effondre, seulement, je pense qu’on peut réduire les dégâts avec de l’argent et une bonne négociation. Rob était également fou de rage que j’aille mettre mon nez dans « son affaire d’article », après tout, c’est à lui et à Ludwig que je dois le retour de Duck.
Mon père et mon oncle ont conclu qu’on ferrait sans, et comme je voudrais, de toute façon, c’est moi qui détiens tout le jeu, c’est moi qui aurais le dernier mot, qu’importe si mes deux frères ne soient pas de mon côté.
J’ai donc saisi l’avocat qui depuis plusieurs jours, gère ma demande auprès des flics, j’espère qu’on trouvera un arrangement et vite. Parce que les affaires « moins clins » elles, elles souffrent, et pas seulement. Tout le monde est à cran. Et pas plus tard qu’hier, le fournisseur de Rob a demandé à ce qu’on nous envoie « passer des vacances » autre part pour éviter d’avoir autant de monde à nos trousses.
J’ai hâte que ses histoires de viol et de blanchiment cessent, mais visiblement, le con qui est sur l’enquête préliminaire aime bien prendre son temps.
Connard
Bref, c’est bien la merde, encore plus qu’il y a une semaine, puisque j’ai décidé de tout remuer.
Je sors de mes pensées en voyant Duck retouché son chignon pour la centième fois, depuis que je suis venu la chercher chez elle.
Elle est vraiment belle dans sa robe de soirée, blanche avec dos nu. Le décolleter trop sage pour moi, me rend à l’étroit dans mon pantalon. On dirait presque une mariée avec sa robe longue. Ouais, on va me jalouser à cette soirée, parce que je vais avoir, la femme la plus sexy de la ville à mon bras.
Bordel je déconne grave.
– Cava ? je demande à Duck pour m’éviter de penser.
Duck se tourne vers moi, elle me sourit, mais je note dans ses yeux, le stress.
– Oui, je déteste ce genre de mondanité. Je sais que mes parents vont y être, et ma mère ne va pas arrêter de me poser des questions sur le pourquoi je suis présente avec toi.
Je souris à mon tour, et me penche vers elle pour embrasser sa joue. Mon souffle vient caresser sa peau, elle frissonne, et ça m’amuse.
– Tu n’auras qu’à lui dire que dans six mois, tu épouses un des enfants Carpenter, ma mère et la tiennent seront ravies de se voir plus souvent.
Elle m’envoie un coup de coude dans les cotes en me traitant de connard. Ça la met mal à l’aise quand je parle d’avenir avec moi, et moi, ça m’agace qu’elle réfléchisse encore. Je me maudis en passant à l’hypothèse de la voir marié avec moi, j’en deviens dur, et idiot, parce que j’adorerais qu’elle le soit.
Je sais qu’elle a eu des ennuis avec son patron vis-à-vis de l’article qu’elle ne rendra jamais. Mais elle ne m’en a pas plus parlé. La nouvelle Duck persiste, celle de la femme forte et indépendante qui ne veut pas être dépendante d’un homme. J’aime ce qu’elle est devenue, ça rend les choses plus compliquées et plus divertissant.
La voiture s’arrête, je remercie Mitch, le chauffeur en lui tendant un billet de cent dollars, il me demande à quelle heure il doit revenir, je lui réponds que je lui enverrais un message. J’ouvre la porte, et tends ma main vers Duck.
– Prête canard ?
Derrière moi, le bruit des photographes et agents de presse résonne. Je croise le regard meurtrier de Duck.
– Appelle-moi canard une seule fois à l’intérieur, et tu verras ce que mon bec fera sur ta queue la prochaine fois qu’ils vont se revoir.
Je souris, mais qu’à moitié parce que j’ai des images d’elles absolument pas catholiques à l’arrière de cette voiture, à genoux entre mes cuisses et ce n’est pas le moment.
J’aide Dawn à descendre, et découvre qu’être une femme et porter des robes sublimes, ce n’est pas si simple. Mais on réussit à sortir sans froisser sa belle robe, pour nous retrouver nez à nez avec une foule de monde.
Dawn s’accroche à mon bras, pendant qu’on marche vers l’entrée, je la sens stresser et ça m’amuse ! Je crois qu’elle aurait préféré être de l’autre côté, en train de tenter d’avoir une interview d’un PDG.
Soudain, un bruit sourd résonne à travers les flashs des journalistes. Le temps semble s’arrêter, tout autour de moi semble aussi au ralenti. J’entends des cris d’horreur et de panique, je tente de me tourner vers Duck pour voir ce qu’il se passe, mais une violente douleur dans la poitrine m’en empêche, je me sens comme couper en deux, traverser de part en part, je me sens étrange. Mon corps m’échappe, la sensation froide du béton sous moi lorsque je m’effondre me fait comprendre que quelques choses vient de se produire. L’odeur écœurante du sang me parvient, et c’est là que je comprends que c’est grave, vraiment très grave.
Amheliie